« L'optimiste parie. Le pessimiste analyse. Il vaut mieux, bien sûr, prendre pour réel un risque réel et pour fictif un risque fictif, mais l'erreur de l'optimiste (erreur du premier ordre) et celle du pessimiste (erreur du deuxième ordre) ont des conséquences différentes L'optimiste qui espère fictif un risque réel va dans le mur. Le pessimiste qui craint un risque fictif ne perd que du temps. Tenant compte de l'irrationalité des opinions, les chefs charismatiques agissent en pessimistes derrière un écran d'optimisme spectacle. Il n'y a que des optimistes légers pour avoir disséminé virus, prions, hydrocarbures, pesticides, plomb, amiante, et les cent mille molécules toxiques qui polluent notre air, notre eau, notre sang et l'avenir de nos enfants. » Eloge du pessimisme, Jacques Costagliola
« Lorsqu’on parle de la fin du Monde, c’est toujours l’idée de malheur qui nous vient immédiatement à l’esprit…
… sans parler des malchances cosmiques qui nous guettent, que se passera-t-il dans la couche vivante de la Terre? Avec la complication et avec l’âge, les menaces intestines se multiplient au sein de la Biosphère et de la Noosphère. Invasions microbiennes. Contre-évolutions organiques. Stérilité. Guerres. Révolutions. Combien de manières possibles de finir ! …Ces diverses éventualités, nous les connaissons bien. … Chacune d’elles est parfaitement vraisemblable. … Prise isolément, chaque volonté humaine peut se refuser à la tâche de monter plus haut dans l’union. Je l’admets… Et cependant, dans la mesure où ils impliquent une idée d’accident prématuré ou de déchéance, je crois pouvoir dire, en m’appuyant sur tout ce que nous apprend le passé de l’Évolution, que nous n’avons à redouter aucun de ces multiples désastres. Si possibles soient-ils en théorie, nous pouvons être sûrs, pour une raison supérieure, qu’ils n’arriveront pas… Une fois, et une fois seulement, au cours de son existence planétaire, la Terre a pu s’envelopper de Vie. Pareillement, une fois et une fois seulement, la Vie s’est trouvée capable de franchir le pas de la Réflexion. Une seule saison pour la Pensée, comme une seule saison pour la Vie. Depuis ce moment l’Homme se trouve former la flèche de l’Arbre, ne l’oublions pas. En lui, comme tel, à l’exclusion de tout le reste, se trouvent désormais concentrés les espoirs d’avenir de la Noosphère, c’est-à-dire de la Biogénèse, c’est-à-dire finalement de la Cosmogénèse. Comment dès lors pourrait-il finir avant le temps, ou s’arrêter, ou déchoir, à moins qu’en même temps, ce que nous avons décidé absurde, l’Univers n’avorte sur lui-même ?
Dans son état actuel, le Monde ne se comprendrait pas, la présence en lui du Réfléchi serait inexplicable, si nous ne supposions une secrète complicité de l’immense et de l’infime pour échauffer, nourrir, soutenir jusqu’au bout, à force de hasards, de contingences et de libertés utilisées, la Conscience apparue entre eux deux. C’est sur cette complicité qu’il nous faut tabler. L'Homme est irremplaçable. Donc, si invraisemblable soit la perspective, c’est qu’il doit aboutir, non pas nécessairement, sans doute, mais infailliblement. Non point un arrêt, quelle qu’en soit la forme, mais un dernier progrès, venant à son heure biologique. Une maturation et un paroxysme. Toujours plus haut dans l’improbable dont nous sommes sortis. C’est dans cette direction qu’il nous faut, si nous voulons prévoir la Fin du Monde, extrapoler l’Homme et l’Hominisation. » Le phénomène Humain, Pierre Teilhard de Chardin.
« Considéré dans sa pleine réalité biologique, l’amour (c’est-à-dire l’affinité de l’être pour l’être) n’est pas spécial à l’Homme. Il représente une propriété générale de toute Vie, et comme tel il épouse, en variétés et en degrés, toutes les formes prises successivement par la matière organisée. Chez les Mammifères, tout proches de nous, nous le reconnaissons facilement avec ses modalités diverses : passion sexuelle, instinct paternel ou maternel, solidarité sociale, etc. … Seul l’amour, pour la bonne raison que seul il prend et joint les êtres par le fond d’eux-mêmes, est capable, — c’est là un fait d’expérience quotidienne, — d’achever les êtres, en tant qu’êtres, en les réunissant… Avec l’amour de l’homme pour la femme, pour ses enfants, pour ses amis, et jusqu’à un certain point pour son pays, nous nous imaginions souvent avoir épuisé les diverses formes naturelles d’aimer. Or de cette liste est précisément absente la forme de passion la plus fondamentale : celle qui précipite l’un sur l’autre, sous la pression d’un Univers qui se referme, les éléments dans le Tout. L’affinité, et par suite le sens cosmique. Un amour universel : non seulement il est chose psychologiquement possible ; mais encore il est la seule façon complète et finale dont nous puissions aimer. » Le phénomène Humain, Pierre Teilhard de Chardin.
« Maintenant que je l'ai fait, je sais que c'était impossible » Mike Horn à propos de sa traversée de l'Antarctique
« Traverser l’Antarctique, c’était mon rêve d’enfant. J’ai décidé d’affronter cette immensité blanche en empruntant un itinéraire jamais exploré, le plus long que l’on puisse envisager : 5 100 km d’une trace presque rectiligne, avec, devant moi, la solitude, les champs de crevasses, les tempêtes de neige, les températures glaciales.
Cette traversée m’obligera, je le sais, à battre des records de vitesse pour ne pas être englouti par l’hiver. On me prédit l’enfer, une course contre la mort. Après trois semaines de bateau pour rejoindre le continent au milieu des icebergs, je plante fermement mes bâtons dans la glace, mes skis bien parallèles, un traîneau de 256 kg fixé aux épaules.
L’espace d’un instant, mon cœur se serre. Comme un début de vague à l’âme. Je repense alors à Cathy, ma femme, qui, avant de rejoindre les étoiles, m’avait soufflé : « Vis pour moi, Mike, vis pour nous deux. » Je ne me retournerai plus. Je regarderai devant. Armé de mon seul ski-kite et de mes mollets, je suis loin d’imaginer l’épreuve qui m’attend. » L'Antarctique, le rêve d'une vie, Mike Horn.
« Ceux qui ne croient pas en l’impossible sont priés de ne pas déranger ceux qui sont en train de le faire. J’ai décidé d’être heureux parce que c’est bon pour la santé. » Voltaire, Candide
HÉRÉSIE (dictionnaire philosophique, 1878) :« Nous savons bien, théologiquement parlant, que l’hérésie étant devenue un crime, ainsi que le mot une injure ; nous savons, dis-je, que, l’Église latine pouvant seule avoir raison, elle a été en droit de réprouver tous ceux qui étaient d’une opinion différente de la sienne.
D’un autre côté, l’Église grecque avait le même droit ; aussi réprouva-t-elle les Romains quand ils eurent choisi une autre opinion que les Grecs sur la procession du Saint-Esprit, sur les viandes de carême, sur l’autorité du pape, etc., etc.
Mais sur quel fondement parvint-on enfin à faire brûler, quand on fut le plus fort, ceux qui avaient des opinions de choix ? Ils étaient sans doute criminels devant Dieu, puisqu’ils étaient opiniâtres : ils devaient donc, comme on n’en doute pas, être brûlés pendant toute l’éternité dans l’autre monde ; mais pourquoi les brûler à petit feu dans celui-ci ? Ils représentaient que c’était entreprendre sur la justice de Dieu ; que ce supplice était bien dur de la part des hommes ; que de plus il était inutile, puisqu’une heure de souffrance ajoutée à l’éternité est comme zéro.
Les âmes pieuses répondaient à ces reproches que rien n’était plus juste que de placer sur des brasiers ardents quiconque avait une opinion choisie ; que c’était se conformer à Dieu que de faire brûler ceux qu’il devait brûler lui-même ; et qu’enfin, puisqu’un bûcher d’une heure ou deux est zéro par rapport à l’éternité, il importait très peu qu’on brûlât cinq ou six provinces pour des opinions de choix, pour des hérésies.
On demande aujourd’hui chez quels anthropophages ces questions furent agitées, et leurs solutions prouvées par les faits : nous sommes forcés d’avouer que ce fut chez nous-mêmes, dans les mêmes villes où l’on ne s’occupe que d’opéra, de comédies, de bals, de modes, et d’amour. »