Monsieur Hubert de Luze, docteur en Anthropologie et spécialiste de l’ethnométhodologie, définit la discipline à partir de plusieurs critères dans « Ethnométhodologie Morale et Grammaires Génératives Des Mœurs[1] ».Après avoir explicité les axiomes, je vais tenter maintenant de les mélanger afin de tirer plusieurs propositions qui se déduisent et qui ne sont pas des inductions structuralistes en m’inspirant de l’ouvrage de Monsieur de Luze, et en appliquant ma réflexion personnelle.
Considérant les acteurs sociaux comme des sociologues profanes, toute personne a une production sociologique unique qui fait appel aux allants-de-soi et a une compétence unique. Cette compétence est contextuelle. En effet elle se dégage des routines dont nous avons les automatismes qui ne sont pas forcément mis en évidence par une réflexion propre au propos. Les allants-de-soi effectuent un travail qui ne donne pas matière à réflexions. Or souvent l’arrogance des sociologues professionnels donne à penser qui ne faut pas donner la parole à l’individu dans son particularisme. C’est justement ce qui est intéressant car la connaissance est contextuelle. Il n’y a pas d’idiot culturel, mais un ensemble de faisceaux qui permettent par la compétence unique de l’individu d’avoir une réponse qui peut paraître indexicale pour les personnes qui ne sont pas membres, et qui prend tout son essor dans la mise en place d’un décor qui est propre aux individus qui appartiennent aux groupes que l’on décrit lors de l’étude du groupe considéré. Alfred Schutz[2] disait que « nous somme tous des sociologues à l’état pratique ». Si Garfinkel prend conscience de cet état de fait lorsque qu’il place des micros lors de débats de délibération d’un Jury, on constate que l’acteur peut explicitement dire pourquoi il prend telle décision à un moment donné pour explicité une action qui nous parait indexicale et qui appartient à son coutumier. Pourtant il s’établit une réponse contextuelle et spécifique de l’acteur qui réfléchit peu, ou un peu, à la réponse qu’il donne dans une situation donnée. Il procède dans toutes ses activités par une historicité et par une spontanéité qui lui donne sa richesse et sa compétence. En fonction des éléments dont il dispose l’individu « à la notion de compétence universelle qu’elle conteste écrit Yves Lecerf, l’ethnométhodologie oppose celle de compétence unique qui doit être construite uniquement à partir de matériaux présents sur le terrain étudié »[3]. L’acteur possède une connaissance linguistique des accounts qui peuvent être un jargon ou un sabir pour l’individu qui n’est pas membre de la tribu dont l’acteur fait partie. De même celui-ci possède la faculté d’adapter sont comportement à l’individu ou à la situation donnée. C’est l’ad hocing, une réponse en fonction de la gravité et de la difficulté du degré de compréhension de la situation ou de l’account considéré. Il le fait instinctivement pour que son account résonne dans l’univers de l’autre. C’est une des fonctions de l’altérité et du regard de l’autre. Il peut décrire son comportement (accountability), il est à même par son ad hocing de se mettre au niveau de l’autre et d’exprimer son sentiment, de décrire avec précision son comportement.
En résumé, le chercheur doit pratiquer la recherche de la trace à la manière d’un policier (tracking), pour coordonner l’ensemble des axiomes et donner une lisibilité jusqu’à la post-analyse.
1 [1]Luze Hubert de, Edition Loris Talmart, Paris, mai 1996.2 [2]Schutz. Der Sinnhafte Aufbau der Sozialen Welt Vienne Springer, 1932.
3 [3]Luze. Ibid, p 33.