VIOLENCE : "Scream" relance le débat
Mel Vadeker ( juin 2002 )A propos de l'ultra-violence et de l'influence de la télévision et du cinéma.
C'est une tache pénible et constante que de dévoiler les faillites dans l'analyse
d'un fait social par certains sociologues profanes ou experts, hommes
politiques ou journalistes. Faire des amalgames et construire des raisonnements
simplistes facilitent l'essor de la désinformation, de la censure sans la construction
au préalable d'une base d'échanges et de débats avec des intervenants sociaux
sur le terrain plus apte à rapporter et analyser cette complexité psychosociologique.C'est ainsi que l'on retrouve constamment des interventions politiques qui
amalgame sans connaissances scientifiques et sans rigueur méthodologique
des jugements personnels définitifs et des amalgames idéologiques servant ensuite
à construire des raisonnements douteux.On oublie bien souvent que lorsque l'on touche à la psychologie humaine, on traite
des formes de complexité difficilement modélisables et généralisables, chaque personne
étant en quelque sorte unique. Pourquoi alors faire compliqué quand on peut faire
simple ? C'est ce que font certains, au lieu d'essayer de comprendre les raisons
sous-jacentes et le plus souvent multifactorielles.Au lieu de se poser les vrais questions, ces gens font dans le simplisme à outrance,
allant même jusqu'a oublier certains principes élémentaires d'analyse et de rigueur.
De quoi ont-t-ils peur ? De s'engager dans des débats difficiles qui révéleraient que
les conditions du passage à l'acte violent ne sont pas prédéterminées par une seule
cause, ici la violence des images cinematographiques, mais issues de modes de vie
déviants et de l'exercice pratique de ces mêmes modes de vie en société.Faire de la prévention et limiter l'accès à certain film au plus jeune par une
signalétique propre, semble le plus raisonnable. Que faire d'autre ?, sinon faire
encore est toujours de l'éducation preventive pour éviter que se développe chez certains
adolescents et jeunes adultes des déviances qui risquent de s'enraciner sur le
long terme.
Voici ci dessous quelques remarques de cinéphiles extraites d'un forum cinéma que je frequente.
> De: solomon kane
> A: ici on parle ciné...
> Date: 08/06/02 10:48:57
> polémique 'scream' : encore un fait divers au milieu de
> milliers d'horribles choses dont s'est emparé le monde des
> médias et maintenant politique pour délivrer leur message
> de censure et de protection des esprits faibles. Mission
> aussi délirante que vaine à mes yeux car dans esprit
> faible, il y a, ça tombe bien justement, le mot faible et
> l'image ne constitue pour lui que l'un des multiples
> tremplins pour titiller sa faiblesse. Alors doit-on aussi
> censurer des pubs, magazines, films, livres ?? Quand je
> vois tous les barges que j'ai pu fréquenter ces dernières
> années qui n'avaient pas besoin de Scream pour être taré,
> j'enrage de voir cette réaction viscérale et haineuse du
> public envers un film, tendant plus à chercher un coupable
> idéal pour dissimuler la déficience psychologique pure et
> simple de l'auteur des faits.
> De: the_clockwork_orange
> A: ici on parle ciné...
> Date: 07/06/02 18:24:12
>
> Après l'assassinat d'une jeune fille par un ami qui venait
> de voir "Scream", un candidat socialiste aux législatives
> demande le retrait de la vidéo.
>
>
> Didier Fischer, candidat socialiste de la 10e
> circonscription des Yvelines à Rambouillet mais aussi père
> de famille, a demandé ce mercredi 5 juin "le retrait
> immédiat de la vente et de la location publique de toute
> cassette, DVD et autre support média du film Scream". Cette
> réaction fait suite au meurtre, le lundi 3 juin à Nantes,
> d'une lycéenne de 15 ans, poignardée à mort par un camarade
> de deux ans son aîné qui déclara lors de son arrestation
> avoir "décidé de tuer quelqu'un", influencé par le film de
> Wes Craven. Un fait divers qui relance l'inévitable débat
> sur l'influence de la violence à l'écran sur la société et
> la jeunesse en particulier...
>
>
>
> Un cas qui n'est pas sans précédents
>
> En effet, ce nouveau fait divers est loin d'être le premier
> cas où un film est désigné comme catalyseur de la violence
> de jeunes spectateurs.
>
> Etat des lieux :
>
> - Matrix et Basketball Diaries :
> Avril 1999 - Deux adolescents américains, habillés de
> grands manteaux noirs (comme dans Matrix), ouvrent le feu
> sur leurs camarades du lycée Columbine. Ils avaient
> plusieurs fois évoqué leur attirance pour Basketball
> diaries.
>
> - La trilogie Scream :
> Avril 2000 - Un adolescent francilien de 16 ans poignarde
> son père et sa belle-mère (voir notre article Un SCREAM
> prémédité)
> Septembre 1999 - Une Australienne de 10 ans a souffert de
> nombreux troubles psychologiques accompagnés d'actes de
> violences notamment envers ses parents. (voir notre article
> Traumatisant Scream)
> Juillet 1999 - Un jeune Américain assassine sa mère après
> avoir vu le premier opus de la trilogie.
> Juillet 1998 - Un adolescent tente d'assassiner les
> parents de son ex-petite amie, après avoir vu le film en
> salles (voir notre article Scream 2 influence la jeunesse).
>
> - Taxi Driver :
> Mars 2000 - Richard Durn, qui a tiré sur un conseil
> municipal à Nanterre, se comparait dans l'une de ses
> dépositions au personnage du film.
> 1981 - L'auteur de la tentative d'assassinat du Président
> Reagan, John Hinckley, se vantait d'avoir vu et revu le
> film de Martin Scorsese et qu'il avait voulu impressionner
> Jodie Foster, qui joue également dans le film.
>
> - Tueurs nés :
> Mars 1995 - Deux Américains tuent un homme et en agressent
> un autre, expliquant leur communion avec le film.
> Octobre 1994 - Florence Rey et Audry Maupin sont les
> amants tueurs de la Nation. On retrouvera dans leur
> habitation plusieurs documents sur le film d'Oliver Stone.
>
> - Warlock :
> 1989 - Un jeune de 14 ans tue avec un camarade un enfant
> de 7 ans, le dépèce et fait bouillir sa peau car il
> espérait obtenir les pouvoirs du personnage principal du
> film.
>
>
> Le débat sur les mesures à prendre
>
> La requête de Didier Fischer pourrait-elle aboutir ? Ce
> fut le cas pour Reservoir Dogs (1992) de Quentin Tarantino
> qui fut interdit à la vente et à la location en Angleterre,
> même si la mesure ne dura qu'un an. Mais le débat reste
> très délicat. Ainsi aux Etats-Unis, un juge a rejeté la
> plainte des familles de victimes du massacre de Columbine
> car selon lui les producteurs de films ou de jeux vidéo ne
> pouvaient pas prévoir ce qu'ils allaient inspirer (voir
> notre article Columbine : le cinéma acquitté).
> Encore une fois c'est surtout l'esprit malléable de
> certains adolescents qui est le plus exposé à ce genre de
> film. Un genre dont les limites d'âge imposées ne freinent
> guère le visionnage. Mais de là à céder à une censure pure
> et dure... L'une des répliques de Scream ne dit-elle pas
> que "ce ne sont pas les films qui rendent psychopathes :
> ils rendent juste les psychopathes plus créatifs" ?
>
> Aurélia Arcusi
> (source Allociné)
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