Quelques citations et aphorismes donnant des éclairages
sur les rapports entre la science et la guerre,
sur la guerre en général et le militarisme en particulier.


PARTIE 1
"Depuis la seconde guerre mondiale, les scientifiques qui travaillent pour la guerre ont toujours recourt aux mêmes arguments. La course aux armements modernes se fonde sur la quête incessante de la connaissance scientifique de telle manière que la science fait partie intégrante du projet militaire et devient un centre d’investissement stratégique. Cette manière de penser provoque un cercle vicieux entre les projets de défense et les contre-mesures offensives de l'autre camp. L'imagination dans ce cas n'a plus aucune limite, il s'agit d'une partie d'échecs à plusieurs joueurs où chacun invente de nouvelles règle au fur et à mesure."
Mel Vadeker, 1999
 

"Notre technologie est de grande valeur et le restera je pense pendant les 5 prochaines années. Les technologies évoluent vite, sans doute pas aussi vite mais d'ici 10 à 20 ans nous pourrions très bien avoir perdu notre avance. De petits pays pourrait faire de nouvelles découvertes et rattraper ainsi leur retard sur nous."
Edward Teller, inventeur de la bombe H américaine, au cours d'un interview sur l'histoire des armes modernes. Diffusé en 2002.
 

« A mesure que les armements de chaque puissance augmentent, ils remplissent de moins en moins les tâches que les gouvernements se sont proposées... Il paraît évident que si cet état de choses se prolongeait, il mènerait inévitablement au cataclysme qu'il a précisément pour but d'éviter, et dont les horreurs font frémir d'avance tout homme doué de pensée. »
Le tsar Nicolas II de Russie (1898) dans sa proposition pour la première conférence de La Haye.
 

« Nous avons été obligés de créer une industrie d'armement permanente de vastes proportions... Cette conjoncture d'un immense appareil militaire et d'une forte industrie des armements est quelque chose de nouveau dans l'expérience américaine. Son influence dans tous les domaines, - économique, politique, spirituel même - se sent dans chaque ville, chaque assemblée d'État, chaque service du groupement fédéral.
    Nous reconnaissons la nécessité impérative de cette évolution, mais nous ne devons pas nous dissimuler qu'elle a des conséquences... Dans les conseils du gouvernement, nous devons être en garde contre toute prise d'influence non justifiée, qu'elle soit délibérée ou non, de la part du complexe militaro-industriel. La possibilité d'une telle montée désastreuse d'un pouvoir abusif existe, et continuera d'exister. Nous ne devons jamais laisser le poids de cette combinaison mettre en danger nos libertés ni notre système démocratique. Nous ne devons jamais rien tenir pour acquis.
    Le désarmement, dans l'honneur et la confiance mutuelle, est un impératif constant... Parce que cette nécessité est si pressante et si évidente, je confesse que j'abandonne mes responsabilités officielles dans ce domaine avec un sentiment très net de désappointement. Ayant vu de prés l'horreur et la tristesse de la guerre, sachant qu'une nouvelle guerre pourrait détruire totalement notre civilisation... je voudrais pouvoir dire qu'une paix durable est en vue. »
Le président Eisenhower (1961) lors de la passation des pouvoirs.
 

"Lorsque tout effort politique vers la paix, de la part de gouvernements qui reflètent les aspirations les plus profondes de leurs peuples, s'avère vain, il est normal de chercher quelles raisons puissantes le font régulièrement échouer. On peut trouver une explication suffisante dans l'existence de ces individus et de ces groupes influents dont les convictions politiques, les intérêts professionnels ou les instincts commerciaux font des adversaires résolus de tout désarmement. Les militaristes sont parmi nous. Peu nombreux sont ceux qui jouent un rôle prépondérant sur la scène politique, pour la bonne raison qu'une attitude en faveur de la guerre rend impopulaire. Ce sont, comme Lord Robert Cecil disait dans une lettre au président Wilson en 1916 des hommes « capables et honorables », mais qui sont « passés maîtres dans l'art de l'obstruction ». Et ils sont extrêmement puissants, comme le prouve l'histoire des échecs répétés des tentatives qui se fixaient pour but le désarmement et la fin des guerres.
    Depuis cent ans du moins, les militaristes se recrutent toujours dans les mêmes milieux. Il y a d'abord les états-majors militaires qui sont profondément imbus de la croyance que les guerres sont inévitables, et que « la nature humaine ne change pas ». Un autre groupe comprend les fabricants et les vendeurs de matériel de guerre qui, encouragés par leurs gouvernements nationaux à accepter un « devoir patriotique », trouvent un solide intérêt dans la préparation de la guerre et le développement de l'exportation des armes. Enfin il y a toujours eu les sociétés patriotiques dédiées à la propagation des idéaux nationalistes et à la glorification de la force militaire. De plus, l'influence des journaux techniques et commerciaux, avec leurs éditoriaux en faveur de l'utilisation militaire des ressources industrielles, ne doit pas être sous-estimée. Les activités de ces différents groupes se combinent pour créer le «complexe militaro-industriel » contre lequel le président Eisenhower mettait en garde ses concitoyens.
    Il y a encore une classe de militaristes, la plus sinistre de toutes : les services secrets et les agences de renseignement qui opèrent en dehors du contrôle normal du gouvernement. Isolés dans leur clandestinité, ils sont laissés libres de poursuivre par des moyens souterrains ce qu'ils considèrent comme l'intérêt de leur pays. La mentalité nécessaire pour faire ce genre de travail en temps de paix veut que ces agences attirent au moins une certaine proportion d'hommes pour qui tous les étrangers sont des ennemis, et toute pensée libérale frappée d'anathème. La plus grande partie du travail des agents secrets reste toujours secret, mais ce qui en apparaît à la surface est de toute évidence hostile à la cause du désarmement et de la paix. Si l'on pense immédiatement à la CIA dans ce contexte, c'est seulement parce que des Américains consciencieux ont révélé à l'opinion publique quelques-unes de ses activités au cours des dernières années. Mais les autres nations, y compris la mienne, ont leurs services secrets, comme elles ont leurs «complexes militaro-industriels»."
Philip Noël Baker (Grande-Bretagne), prix nobel de la paix 1959.
Extrait d'un article de 1968 publié dans un ouvrage collectif "Unless Peace Comes" comprenant des textes réunis par Nigel Calder (disponible en francais sous le titre "Les Armements Modernes", chez Flammarion, 1970)
 

"Le secret de la bombe derait être confié à un gouvernement mondial. (...) Dois-je craindre la tyrannie d'un gouvernement mondial ? Bien sûr. Mais je crains encore davantage qu'une autre guerre, ou que d'autres guerres n'éclatent. Il est certain que tout gouvernement est, dans une certaine mesure, mauvais. Mais un gouvernement mondial est préférable à la calamité des guerres."
Albert Einstein, extrait de "Atomic War or Peace", 1945
 

"Je ne me considère pas moi-même comme le père de la libération de l'énergie atomique. Mon rôle en la matière a été tout à fait indirect. En fait, je n'ai pas prévu qu'elle serait libérée de mon vivant. Je pensais seulement qu'elle était théoriquement possible. Elle n'est devenue praticable qu'a la suite de la découverte accidentelle de la réaction en chaîne, et ce n'est pas quelque choses que j'aurais pu prévoir"
Albert Eintein,  extrait de "Atomic War or Peace", 1945.
 

"Il est caractéristique de la mentalité militaire que les facteurs non humains (bombes atomiques, bases stratégiques, armements de toutes sortes, maîtrise des matières premières, etc.) soient considérés comme essentiels, alors que l'être humain, ses désirs et ses pensées - en bref, les facteurs psychologiques - sont tenus pour négligeables et secondaires. (...) L'individu est ravalé (...) au rang de matériel humain.
Albert Einstein, extrait de "Military Mentality", 1947