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Ce livre est la propriété exclusive de Frédéric Weskamp Lorentz. Il peut-être distribué gratuitement, mais en aucun cas vendu ou publié sous tout autre forme que la présente. |
1999 ou Dieu pris sur le fait
(une présentation du livre par le site caféduweb.com, 29/04/2001)
Malraux avait dit "le 21° siècle sera spirituel ou il ne sera pas". Frédéric Weskamp-Lorenz, dans son ouvrage pousse le bouchon à distance cosmique. Deux chercheurs découvrent ... l'âme, en laboratoire, mis sur la piste par une mystérieuse lettre. C'est la structure atomique logée dans l'encéphale humain qui met l'homme en contact avec ... Dieu sait quoi! C'est expérimental, ça marche.
Un diplomate de l'ONU, Scharff-Hansen, récupère l'invention et crée dans une université américaine un institut des nouvelles sciences humaines. On va savoir, enfin, après des millénaires d'obscurantisme, comment fonctionne réellement l'homme, à quoi il sert, qu'elle est sa fonction dans le cosmos. La transcendance analysée au laboratoire, passée au scanner. Les communautés religieuses, voyant leur plates-bandes scientifiquement piétinées, réagissent. Les religieux catholiques, juifs, bouddhistes, musulmans, serrent les coudes, se réunissent, soucieux de ne pas laisser les scientifiques mettre la main sur ce qu'il considèrent être une chasse gardée.En arrière plan il se passe des choses bizarres dans le monde. Ce ne sont plus les hommes qui sont déracinés, mais des peuples entiers, qui se mettent en marche, inexplicablement, comme des sauterelles migratrices, franchissant les déserts, en effectuant des migration absurdes. Une planète devenue folle.
Dans ce livre étonnant, des histoires qui semblent n'avoir au départ aucun trait commun, s'entremêlent et convergent comme des fleuves, vers une chute finale dont nous vous laissons la surprise. Portrait d'une planète, avec ses dirigeants irresponsables, dépassés, un Président des États-Unis qui suce son pouce, seul dans son bureau, des sectes qui fleurissent, ici et là, de plus en plus de services secrets qui grouillent. Un livre fou, une peinture à la serpe de la grande comédie humaine, une fiction qui pourrait bien devenir réalité.
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Base de Roswell,
le 6 juillet 1947
Le vieux camion s'arrêta devant la maison du shérif. Mac Brazel en descendit précautionneusement. Avec les orages de ces derniers jours, son arthrite du genou le faisait souffrir. Passant à l'arrière du véhicule, il souleva la bâche et prit un mystérieux morceau de métal parmi la dizaine qu'il avait ramassé dans son champ. Heureusement, ils étaient aussi légers que du bois de balsa. Il n'eut aucun mal à le sortir.
Brazel monta les quatre marches de la maison avec difficulté. Le bureau était vide, peuplé par quelques mouches affolées par les turbulences du ventilateur. Mac Brazel s'assit et attendit quelques minutes. Un bruit de chasse d'eau se fit entendre et le shérif Wilcox entra dans le bureau. C'était un homme d'une cinquantaine d'années, la tempe grisonnante et les yeux bleus. Il ne remarqua pas tout de suite le vieux fermier.
— Bonjour Georges.
— Ah ! Salut Brazel, encore des problèmes avec les voleurs de bétail?
— Non, cette fois-ci, j'ai trouvé un avion sur mes terres.
— Un avion de quel type?
— Je n'en sais rien. Mais vu ce qu'il en reste, il va être difficile à identifier. Il y a des débris sur plus d'un kilomètre carré. Les militaires ont encore fait des leurs.
— Pourquoi les militaires?
— Ben, regardez-moi ça, un métal aussi léger et si résistant. Je n'ai encore jamais vu un ferraille comme ça! Ca ne se laisse entailler ni avec un couteau, ni avec quoi que ce soit.
Le shérif pris le morceau que lui tendait Brazel. Effectivement, il avait un aspect très étrange. Il était de couleur argent très clair, et brillant. Le shérif fut surpris par son extrême légèreté. Mais ce qui l'étonna avant tout c'était sa rigidité. Il essaya de le plier de toutes ses forces, mais l'objet n'accusa aucune déformation.
Le shérif, intrigué, décida immédiatement d'appeler la base militaire de Roswell. Une heure plus tard, une Jeep s'arrêtait devant le bureau et trois hommes entrèrent, en uniforme.
— Shérif Wilcox?
— Bonjour mon colonel.
— Bonjour mon vieux, alors montrez-nous cette trouvaille.
Les trois hommes, Le colonel William Blanchard, l'officier du renseignement Cavitt et le Major Jesse Marcel regardèrent à tour de rôle le débris. Le major Marcel sortit immédiatement de sa sacoche un petit compteur Geiger.
La base de Roswell, au nouveau Mexique, accueille la première unité au monde de bombardiers atomiques, le 509e Bomb Group, qui a largué les bombes sur Nagasaki et Hiroshima. Les américains étaient alarmés par tout événement suspect aux alentours de la base, où de nombreux espions russes, en pleine guerre froide, avaient été repérés. Mais ce que ces hommes avaient devant les yeux était particulièrement étrange.
— Alors Major, des traces de radioactivité?
— Aucune mon colonel.
Puis, ils se repassèrent le débris et essayèrent de le plier.
— Vous n'y arriverez pas, dit le shérif. J'y ai déjà essayé toute ma force. Dites Donc, vous avez inventé un sacré métal. Dommage que votre avion se soit écrasé...
Les trois militaires se regardèrent. En effet, sacré matériau, dont ils auraient bien aimé connaître la provenance.
Mac Brazel, avait regardé la scène avec indifférence. Les militaires allaient nettoyer son champ et ramasser leurs petits joujoux Il retournerait à son bétail, chacun son métier.
— Depuis quand êtes-vous en possession de ceci?
— Depuis 4 jours, répondit Mac Brazel.
— Et vous ne venez que maintenant?
— Dites Donc, je ne suis pas chargé de garder vos avions, moi. Mes bêtes me suffisent. D'ailleurs, je vais bientôt devoir y retourner.
— Une seconde, quand exactement avez-vous trouvé ces débris?
— Et bien voilà, mon Commandant,
— Colonel, je vous prie
— Tout ce que vous voudrez. Eh bien nous étions chez le vieux Peter, à jouer aux cartes sur sa terrasse. Le pauvre vieux, il est bien seul depuis que sa Louise a passé l'arme à gauche. Il essaie bien de se distraire avec ses chevaux, mais vous savez, à son âge...
— Abrégez, je vous prie, passez-nous les détails...
— Oh, mais laissez moi raconter, si vous m'interrompez tout le temps... Bon, donc nous jouions aux cartes, j'avais un superbe brelan, quand il y eu un drôle d'éclair.
— Il y avait de l'orage?
— Oui, c'est pour cela que nous étions sous l'auvent de la terrasse. Et puis nous avons vu un drôle d'avion, très brillant. Ah ça on peut dire qu'il était bizarre. De loin, on aurait dit, comment dirais-je... Vous allez rire... Mais avec tout votre respect, on aurait dit une soupière.
— Il avait la forme d'une soupière!
— Oui, mais sans les anses. Mais c'était loin, on a pas bien regardé, vu que j'avais un brelan et que...
— Et ensuite?
— Ensuite, il y a eu un grand bruit, mais ce dont je suis sûr, c'est que c'était pas le tonnerre. Non, le bruit était différent. Le vieux Peter m'a dit " dis donc Mac, c'est y pas dans ton champ qu'il y eu la foudre?". Mais moi j'avais mon brelan, et je connais ses trucs pour me faire perdre ma concentration.
— Qu'avez vous fais alors?
— Et bien j'ai abaissé mon brelan et j'ai ramassé ma mise.
— Non, dit le Colonel, visiblement agacé par la lenteur de Mac Brazel, vous êtes allé sur les lieux?
— Ah ben oui, deux heures plus tard. On a fait la revanche entre-temps.
— Et avez-vous vu quelques chose d'anormal?
— Mes bêtes avaient probablement eu peur de l'éclair et s'étaient échappées de leur enclos. Au passage, elles m'avaient bien bousillé une centaine de mètres de clôture.
— Mais pas de traces de l'objet?
— Non, il faisait nuit Je me suis dit que le lendemain il allait falloir que je répare cette fichue barrière et qu'il me faudrait toutes mes forces. Alors, je suis allé me coucher.
— Soit. Et le lendemain, quand Vous êtes retournés sur les lieux?
— Les bêtes étaient presque toutes rentrées. Le seul point d'eau des environs est dans l'enclos. La soif les a fait revenir. Ensuite, j'ai réparé ma clôture.
— Et quand avez-vous découvert les débris?
— Ça, je les ai vus tout de suite. Ca passe pas inaperçu. Mais il y avait l'enclos à réparer. Le travail d'abord.
— Vous n'avez pas eu la curiosité de chercher l'appareil.
— Oh, mais moi je m'occupe de mes bêtes. Et puis les débris s'étalaient sur toute la colline. C'est plus chez moi, là-bas. Et ce que mon voisin fait dans son champ, ça ne me regarde pas. Chacun chez soi.
Le colonel commençait à s'échauffer. Puis, il réfléchit une minute et prit une décision.
— Major, et vous aussi Cavitt, vous allez accompagner Brazel avec quelques hommes. Moi j'expédie les débris à Washington pour une expertise. Exécution.
Une heure plus tard un gros B-25 s'envola avec à son bord les étranges débris. Au même moment, le major Marcel et le capitaine Cavitt suivaient le vieux camion de Brazel sur les routes du nouveau Mexique. Ils arrivèrent dans la petite localité de Coronna quelques heures plus tard, à la tombée de la nuit.
Les bêtes paissaient tranquillement dans l'enclos. Marcel et Cavitt escaladèrent la petite colline. Lorsqu'ils arrivèrent au sommet, ils virent ce qui allait intriguer le monde jusqu'à la fin du siècle.
Paris, le 30 Juin 1998
Cent mètres séparent la nouvelle Université des locaux de l’ancienne Faculté des Sciences, rue Cuvier, dans le cinquième arrondissement de Paris. Cette courte distance, Carla l’avait parcouru des milliers de fois. Aujourd'hui, elle lui paraissait plus longue, car la grosse pluie d’orage de Juin aurait traversé le plus épais des imperméables. A un de ses camarades, qui l'accompagnait, elle avait posé une question en chemin. Celui-ci, occupé à courir sous la pluie, avait refusé de répondre. Carla était une fille curieuse de tout. Une marche sous la pluie éveillait toujours en elle la même question: pour être le moins mouillé fallait-il marcher ou courir? Certes, en marchant on restait plus longtemps sous l’eau, mais en courant, les gouttes frappaient plus violemment le corps. Sans compter les risques de chutes. Carla avait décidé de marcher. Courir lui semblait superflu. D’autant plus que le cours qu’elle allait subir dans l'amphithéâtre Cuvier, traitant de généalogie génétique, ne la ravissait guère.
Il s’agissait de montrer les liens existants entre les ADN de différents virus ou membres d’une même branche de l’évolution. L’ADN est une molécule très complexe, présente dans chacune de nos cellules, qui contient toute notre information génétique, de la couleur de nos yeux, jusqu'à la taille de nos gros orteils. Nos maladies, peut-être même notre caractère ou vos passions pour le chocolat y sont inscrits. Les scientifiques, toujours très assurés lorsqu’il s’agit de parler au grand public, commençaient à peine à entrevoir la masse d’information contenue dans cette molécule. Quelques dizaines d’années plus tôt, l’appartenance à une même branche de l’évolution était démontrée en comparant la taille des os, la forme des mâchoires, ou le nombre de pétales. La découverte de l’ADN permit de situer tous les chaînons de l'évolution et de s’apercevoir qu’il en manquait.
L'amphithéâtre Cuvier vaut le déplacement. C’est à cet endroit même que Marie Curie donna ses cours sur la radioactivité. La salle est large et peut contenir jusqu'à cinq cents étudiants, sur des bancs de bois très inconfortables. Les tables recèlent nombre de graffitis, qui sont la patine des bancs d’Université. Il y est notifié que le prof est un âne, que le poids de l’atome d’oxygène est 32 et que les prouesses amoureuses de Jacqueline sont remarquables et surpassent de loin celles de Berthe. Nos futurs scientifiques et ingénieurs avaient gravé là pour la postérité leurs petites conditions d’humains.
Le plafond de la salle est une immense verrière. Pour éviter de coûteux nettoyages, l’intendance en avait fait peindre les vitres. Lorsqu’il faisait soleil, l’amphi prenait des allures de vieux hangar, ce qui ne faisait que rajouter à son charme. Car du charme, il en avait. Il sentait bon le passé et la science de jadis. En son centre trônait un immense bureau ciré, clos sur la droite par une paillasse de carreaux blancs et un évier jaunis, qui témoignait de milliers d’expériences de chimie. Derrière pendaient deux tableaux noirs, équilibrés par des contrepoids. Pendant le cours, le professeur faisait glisser les deux immenses pans de bois l’un sur l’autre. Carla assistait avec ravissement à la manœuvre comme s’il eut s’agit d’un marin affaissant la voile d’un trois mâts.
L'amphithéâtre était presque vide. Seuls treize étudiants de dernier cycle assistaient à ce cours. L’approche des examens avait vidé les bancs de l’université. Les élèves préféraient réviser à l’ombre des platanes en fleurs de jardin du Luxembourg, ou bien à l’ombre d’étudiantes, en fleurs également. Le professeur fit son entrée. Mme Guillaumet était l’archétype de la chercheuse. Laide, sans maquillage, ses cheveux blancs jaunis étaient ramassés en chignon sur le haut du crâne. Elle portait l’uniforme témoignant de son statut d'enseignante : la blouse blanche. Des tâches de craies rouges et blanches ornaient l’entrée des deux poches latérales. Après avoir posé sa sacoche de cuir sur la paillasse, elle plongea sa main dans son réservoir à craies et commença son cours.
Les généticiens ne connaissent que quatre lettres. Chacune d’entre elles représente l’un des composant la molécule c125omplexe de l’acide désoxyribonucléique, ou ADN. Deux éléments s’accrochent l’un à l’autre. Les paires s'enchaînent et forment une très longue échelle torsadée. Le sens de rotation est le même pour toutes les espèces vivantes sur Terre. Ceci est encore mal expliqué, même si une théorie officielle rassure les angoissés de la science. Les quatre lettres élémentaires utilisées sont le C, le G le T et le A. Mme Guillaumet, très digne énonça pendant une heure et demie des babillements d’enfants qui réjouirent Carla:
— En pratique, la séquence GAGATATA se retrouve chez le murex ainsi que chez le bernard-l'ermite. Cependant, il faut noter que GAGACACA joue un rôle similaire à TAGATGTTA comme le montre la chromatographie des gonades de bigorneaux, présentée en tout début de semestre.
Carla était rêveuse. A deux pas d’ici, à côté du porche menant au Jardin des Plantes, se trouvait la maison où Antoine César Becquerel avait mis en évidence la radioactivité, en laissant traîner par hasard une plaque photographique sur une boite de sels d’uranium. Une petite plaque commémorative, cachée derrière un buisson d’aubépines rappelait que cette bâtisse fut le siège d’une des plus grandes découvertes de l’homme, l’une des plus dangereuses aussi. Où étaient passés ces temps d’aventure, quand les savants faisaient une découverte fondamentale chaque année. Aujourd'hui, la science est devenue trop technique, trop spécifique, tant les domaines d’études sont vastes. Peu de scientifiques avaient une culture suffisante pour embrasser la totalité des matières. Peu d’entre eux en avaient d’ailleurs envie. Carla se sentait perpétuellement frustré. Un jour, elle avait interrompu le cours et posé à madame Guillaumet une question de fond sur l’évolution. Celle-ci en avait conçu de l’humeur, éluda la question et revint à son cours. Avait-elle la réponse ou bien ses connaissances ne se bornaient-elles qu’à la dissection des gonades de gastéropodes— alias couilles de bigorneaux?
Lorsque le cours se termina, Carla avait noirci une demie page. Le soleil était réapparu. Lors de sa pose de midi, elle aimait se promener dans les allées du jardin des plantes. Un bâtiment majestueux le clôturait vers le sud. Cet immense hall recueillait les découvertes du début de ce siècle en matière de Darwinisme. La salle de l’évolution retraçait les aventures de la vie, de la première bactérie au plus gros des cétacés.
Le bâtiment, rénové de fond en comble était visible de la grande allée du parc, tel un château de la renaissance fermant une allée de Platane. D’ailleurs le jardin avait été redessiné par les grands architectes de Louis 14. Son rôle était à l’origine la culture de plantes médicinales. Puis, au cours des siècles il avait gardé sa fonction de pôle scientifique, en donnant naissance dans le quartier à nombreux institut, puis deux siècles plus tard Jussieu, la plus grande Université européenne.
Carla remarqua un détail nouveau dans ce paysage qui lui était si familier. De grands panneaux avaient été plantés la veille face à l’entrée de l’édifice. Longs d’une dizaine de mètre ils relataient la vie de Charles Darwin. Carla rafraîchit alors se mémoire sur ce qu’elle avait appris gamine à l’école. D’ailleurs, toute une classe de septième s’était assise devant les panneaux et écoutaient le maître avant la visite. Carla se mit dans un coin et profita de cette leçon improvisée.
— Charles Darwin naquit au début du dix-neuvième siècle dans une province anglaise, dit l’instituteur. Au cours d’un tour du monde de cinq ans, à bord de l’un des vaisseaux de sa très gracieuse majesté, il fit de remarquables observations. De retour en Angleterre, il énonça sa célèbre théorie de l’évolution par sélection naturelle et survivance du plus apte. Elle se heurta violemment aux théologiens et aux hommes d’église.
Au fur et à mesure de l’exposé, Carla se faisait des réflexions d’adulte sur la leçon qu’elle avait, elle aussi, subit lors de sa scolarité. Si à l’époque Darwin dut faire face à tant de résistance, c’est que le mythe d’Adam et Eve était pris au pied de la lettre. Que les hommes aient pu descendre du singe, ou plus précisément, que leurs ancêtres leur eussent ressemblé, était un blasphème. Elle se souvint d’ailleurs que le Vatican n’avait toujours pas entériné de cette théorie. Mais enfin, que peut-on attendre d’une institution qui mit plusieurs siècles avant de reconnaître les théories de Galilée.
L’instituteur continuait son exposé, sans voir que Carla l’écoutait avec attention.
— Charles Darwin était un homme discret et modeste, doué d’un sens aigu de l’observation. Il analysa avec calme les arguments de ses détracteurs et acquit la réputation d'un auteur sérieux et rigoureux. Il eut toute se vie à se battre contre les idées reçues.
Quelques décennies plus tard, une autre théorie vit le jour: le catastrophisme, selon laquelle l'évolution n’était plus un phénomène discontinu, mais se déroulait par à-coups, à travers une suite de catastrophes . Les tenants de la théorie évolutionnistes se heurtaient, quant à eux, au problème des "chaînons manquants" .
Les promoteurs de cette nouvelle théorie rencontrèrent une intolérance virulente de la part des darwinistes, qui n’est pas sans rappeler l’intégrisme dont fut victime leur maître un siècle plus tôt.
Carla sourit. Décidément, les scientifiques sont des hommes comme les autres, qui oublient vite les leçons du passé.
Pour elle, ces deux théories étaient en fait semblables. Il importait peu que l’évolution soit le résultat d’une lutte continue pour la vie, ou de catastrophes naturelles. La vérité se situait peut-être entre ces deux extrêmes. Mais surtout, elles réfutaient toutes les deux l’idée d’une puissance directrice de l’évolution. Dieu, car il faut bien lui donner un nom, ne faisait pas partie des hypothèses évolutionnistes.
Ceci gênait Carla, qui avait hérité de la religion de ses parents: elle était athée. Toutefois, l’absence d’une volonté dans la marche de l’évolution lui semblait incongrue. Sans imaginer qu’un grand vieillard à barbe blanche, ou qu'une lumière divine tirât les ficelles de l’évolution, il lui paraissait improbable que notre présence sur terre, que notre morphologie fut le résultat du hasard de la lutte pour la vie.
Un de ses professeurs d’université, lui avait un jour fait une remarque étrange.
— Vous êtes vous déjà posé des questions sur le nombre de nos doigts? Nos mains permettent d’effectuer des mouvements d’une grande complexité. Cinq est le nombre optimal de doigts pour pouvoir tourner une boule sans qu'elle vous échappe. Essayez. Prenez une orange ou une pomme, ou n’importe quoi de rond qui vous tombera sous la main. L’objet restera stable s’il repose sur trois doigts. Bien sûr, il est possible de le tenir avec deux seulement. Mais il faut alors le serrer, ce qui ne représente pas un équilibre parfait. Pour faire tourner l’orange il faut que deux doigts au moins changent de position. Trois doigts en permanence en contact avec l’objet, plus deux doigts qui bougent égalent cinq. Pas six, ni quatre : cinq semble être une constante. Est-ce le fruit du hasard?
La douceur du soir et la fraîcheur de l’air lavé par la pluie de l’après-midi reléguèrent ces souvenirs loin derrière les rêveries de Carla. Elle choisit un banc, en essuya quelques centimètres carrés et y posa son charmant. Cette belle fille brune avec des reflet roux, campée sur de longues jambes fines, avait un visage doux qui donnait à son apparence les rondeurs qui faisaient défaut à son buste. Belle sans en profiter, elle avait du succès auprès des garçons. Mais ceux-ci, plus intéressés par les travaux pratiques ne faisaient que peu de cas de son intelligence.
La fumée de sa cigarette s’élevait en volutes au-dessus de sa tête. Bien plus haut, dans le ciel de Paris un point blanc apparut derrière un nuage. Après quelques zigzags rapides, il disparut subitement. Personne ne le remarqua. Mais qui regarde encore les nuages à notre époque, sinon ceux qui figurent sur les photos prises quotidiennement par les satellites et commentées par le crétin de service?
Base de Roswell, le 8 Juillet 1947.
Le major Marcel était bien embêté. Il venait de rentrer de Coronna avec une étrange cargaison. Dans son petit bureau sombre, près du mess des officiers, il se rongeait les ongles face à son téléphone en Bakélite noire. Comment allait-il annoncer la nouvelle? Le capitaine Cavitt était resté sur les lieux, et son colonel était à Washington, injoignable.
Maintenant, il fallait qu'il téléphone à Forth Worth, réveille son ancien lieutenant, et le mette au courant des événements des derniers jours.
Les doigts rongés de Marcel firent cliqueter le cadran. La sonnerie du téléphone retentit dans le combiné. Comment allait-il lui annoncer tout ça?
— Hm..., gargouilla son interlocuteur sur un ton peu réglementaire.
— Désolé de vous déranger mon commandant, ici Marcel de la base de Roswell.
— Major, j'espère que vous ne me réveillez pas pour parler du temps ou vous étiez sous mes ordres à Westpoint... Qu'y a-t-il?
— Un orage a éclaté il y a quelques jours, et depuis on est bien embêtés.
— La foudre est tombée sur la base? Y a-t-il des appareils détruits, questionna le commandant Johnson, maintenant tout à fait réveillé.
— Non, non.
— Vous ne me téléphonez quand même pas parce que vous avez peur de l'orage?
— Mon commandant, c'est pas la foudre qui est tombée. C'est les vaches...
— Il a eu de l'orage et les vaches sont tombées. Le cas est clair. Major, allez cuver votre bourbon, je suis trop fatigué et je vous engueulerai demain.
— Non, je veux dire, les bêtes d'une ferme du coin ont été affolées par l'orage et le fermier a fait une drôle de découverte dans son champ.
— Ah, ah...
— Oui, plein de pièces de métal réparties sur un hectare, et puis des types, bizarres... morts.
— Un accident de voiture?
— Ben, en plein désert, ça me parait difficile. Non, cela ressemble plutôt à un crash d'avion.
— Des russes. Ah les salauds! Et leur avion a été frappé de plein fouet par la foudre...
— Non, non, c'est pas des russes, ils font un mètre quarante de haut. Et puis pas de traces de train d'atterrissage, de carlingue ou d'hélice.
— Peut-être un engin de reconnaissance tout nouveau. Vous dites 1 m 40? Hum, peut-être la place dans l'avion était-elle restreinte. On a bien pris des italo-américains dans les sous-marins durant la guerre, à cause de leur petite taille.
— Oui, mais, ils sont bizarres ces russes...
— Les russes sont bizarres. On vous l'a répété des milliers de fois durant votre formation.
— Oui mais, alors bizarres à ce point-là...
— Pourquoi, ils sont bizarres comment?
— Ils ont une très grosse tête ronde, ils sont gris jaunes, et ils ont six doigts.
Le commandant Johnson, de son lit à Forth Worth, prenait l'affaire très au sérieux.
— Conservez les corps jusqu'à ce que nous arrivions. Je m'envole de Forth Worth le plus vite possible.
— Mes chefs sont déjà au courant, mais ils ne sont pas à la base en ce moment et nous avons sacrement les jetons. Alors, je vous téléphone...Mais comment on fait pour conserver des corps?
— Démerdez-vous mon vieux. Et puis cachez les pièces de.. de l'avion. Secret absolu là dessus.
— Bien, mon commandant. Mais vous savez, tout ça c'est assez impressionnant.
— Remettez-vous, mon vieux., et au travail.
A la base, le camion fut déchargé dans un hangar vide et une garde y fut affectée. De retour dans son bureau, Marcel avait la main sur la bouteille de bourbon qu'il cachait dans le dernier tiroir en bas à droite de son bureau, quand le téléphone sonna.
— Marcel?
— Oui mon commandant, répondit le major, sa main faisant le salut réglementaire sans lâcher la bouteille.
— Je viens de discuter avec Washington. Nouvelles instructions d'en haut. Faites une autopsie avant que les corps ne commencent à se décomposer. Vous me filmez tout ça et on se voit demain pour votre rapport. Ne prenez plus contact par téléphone. Utilisez les fréquences radio codées.
— Oui mais pour les corps?
— J'en sais rien, mon vieux. Téléphonez au croque-mort, je ne sais pas moi. Faites preuve d'initiative. Et lâchez cette bouteille.
Retour dans le jardin des plantes
Le jardin des plantes vibrait de milliers d’insectes qui assistaient les jardiniers dans l’embellissement des parterres. Ils se frottaient consciencieusement aux milliers de fleurs, qui sont autant de sexes, et dispersaient la vie de pistils en étamines.
Parmi les meutes d’enfants qui sortaient du muséum d’histoire naturelle, un petit homme essayait de se frayer un chemin. Simon Grabstein n’était pas là pour son plaisir. Sortant du bureau de son nouveau professeur, il avait en poche une affectation pour un laboratoire de paléontologie du sud de la France. Cette perspective ne l’enchantait guère. Au moins allait-il retrouver la chaleur méditerranéenne de son Jérusalem natal qu’il avait quitté sur un coup de tête quelques années plus tôt, venant faire ses études à Paris.
En se dirigeant vers la station de métro de la place Jussieu, il aperçut de loin Carla assise sur son banc. Il ajusta ses lunettes pour mieux la regarder, et fut ravi par sa beauté au fur et à mesure qu’il se rapprochait et que les effets de sa myopie disparaissaient. Encore une que son charme de petit juif à la Woody Allen laisserait froide. En passant à sa hauteur, il tourna la tête vers Carla qui lisait, un bras appuyé sur l’accoudoir. Décidément Simon la trouvait bien belle, une certaine classe et une allure racée la faisait sortir du lot. Une fille inabordable à qui l’on épargne le rentre-dedans classique.
Simon venait, à cet instant, de faire une rencontre de choc. Avec un arbre. Avec le platane situé sur sa trajectoire et qu’il n’avait pas vu trop occupé à détailler Carla. Bel effet ... Sous le choc, Simon à moitié assommé s’assit sur son maigre séant et se frotta la tête. Carla, surprise par le choc sourd de la tête de Simon sur le platane leva la tête et sourit avant de s’enquérir de son état.
– Comment allez-vous ?
-– Distraitement, comme vous le voyez. Je crois que je me suis fais la bosse des maths.
Carla sourit.
– Vous êtes myope ?
– Oui, mais pas aveugle, j'étais en train de regarder... les belles plantes du jardin quand ce platane m’a sauvagement agressé.
La jeune fille fit mine de ne pas relever l’allusion. Sous ses airs absorbés, elle avait vu Simon venir et avait trouvé son apparence surprenante. Il était petit avec un nez busqué, très méditerranéen. “ Il a du caractère” aurait dit sa mère très diplomatiquement. Carla proposa à Simon de venir s’asseoir à côté d’elle.
Le reste de la conversation ne regardait qu’eux. Simon partait vers Aix-en-Provence avec une belle bosse sur la tête et le numéro de Carla dans la poche.
Base de Roswell, 7 heures du matin
— Pourquoi cette combinaison? Je dois mettre ça pour filmer?
— Ordres du Colonel. C'est valable pour tout le monde. C'est tout ce qu'on a trouvé pour se protéger.
Jack Barnett était déconcerté. Il examina la combinaison de tissu argenté, identique à celles qu'utilisaient les atomistes de Los Alamos, où il avait filmé quatre ans plus tôt, dans le cadre du projet Manhattan.
— Se protéger de quoi, bon dieu? Qu'est-ce que c'est que cette histoire. On n'est pas dans un centre atomique, ici.
Il avait été tiré de son lit quelques heures plus tôt par un caporal qui l'avait brutalement sorti de ses rêves. En vingt minutes, deux généraux l'avaient appelé. Du jamais vu. Il avait dû sauter dans un B-25 et rejoindre la base de Roswell immédiatement avec sa Bell and Howel et une caisse de films vierges.
— Prenez tout ce que vous avez, avait précisé le général.
— Tout? Mais j'ai cent cinquante bobines, de trois minutes.
— Très bien, vous prenez tout.
— A vos ordres, mon général.
Barnett n'avait jamais revêtu lui-même ce genre de combinaison, qui couvrait tout le corps. Les gants étaient attenants aux manches. Sur la tête, il avait une espèce de heaume, porteur d'une meurtrière en Rhodoïd.
— Pour filmer et changer les films, ça va être commode, tiens....
Deux médecins militaires, qu'il n'avait jamais rencontrés, avaient revêtu leurs tenues en même temps que lui.
Une fois les trois hommes prêts, le cinéaste et deux médecins, une porte s'ouvrit sur une petite pièce attenante qui faisait office de sas. Ils entrèrent dans une autre salle, vidée pour la circonstance. Au milieu trônait une table métallique, et à ses pieds se trouvait une caisse de roquette. Un filet d'eau s'en échappait.
— Gosh, se dit il. On va me faire filmer une arme chimique, et qui fuit en plus. C'était donc ça les risques de contamination. Mais ces combinaisons sont bien sommaires. Tout cela n'est pas très syndical...
Puis, le médecin en chef se tourna vers lui.
— Préparez vous mon vieux, hurla-t-il à travers son masque. Et quoi qu'il arrive, gardez votre calme. Vous aurez dix secondes pour vous remettre de l'émotion.
La caméra au poing, le cinéaste vit les deux médecins ouvrir la caisse de roquettes. Il commença à filmer. Mais dès qu'il vit le contenu de la boite, il baissa les bras et eu un haut le cœur.
La caisse renfermait un corps, conservé sommairement sur un lit de glace. Mais quel corps... Un drôle de type. Petit, très musclé, une peau jaunâtre, une tête ronde énorme, et une blessure béante sur le dessus de la cuisse droite.
Le corps fut placé sur la table. Le ventre était gonflé. Même à travers la combinaison il commençait à sentir l'odeur. En faisant d'autres prises de vue, sous d'autres plans, le jeune cinéaste aperçu deux autres caisses dans un coin de la pièce. Il y avait donc plusieurs cadavres.
Les deux médecins arrachèrent du corps des lambeaux de peau et les placèrent dans un récipient. Quelques minutes plus tard, l'être était complètement à découvert. En fait de peau, il s'agissait d'une couche plastique protectrice. Il fit quelques gros plans sur la bassine qui les contenait.
L'être était probablement une femme. Une fente était nettement reconnaissable entre ses cuisses. Mais pas de mamelles, ni de nombril. Les bras descendaient jusqu'au dessous de la taille et étaient terminés par de petites mains fines à six doigts.
La tête, visiblement très lourde était maintenue sur un cou court, soutenue par des muscles puissants. Ses yeux, larges et ronds étaient entièrement noirs. Pas de blanc.
L'odeur devenait franchement pénible et les médecins étaient décidés à opérer vite. Le scalpel entama la gorge, puis descendit le long de la cage thoracique. On aurait dit celle d’un poulet, pensa Barnett.
Les médecins coupèrent les côtes à la pince et l'ensemble cœur-poumons apparut. De petits poumons, ou enfin ce qui devait faire office de cœur et de poumons. Car les organes internes n'avaient rien d'humains. Ouverte du cou jusqu'au bas-ventre, la créature était vidée par les médecins, tels des apprentis mécaniciens démontant un moteur pour la première fois.
Les organes était dans un état de décomposition avancé. La créature était sans doute restée de longues heures sous le soleil brûlant du Nouveau-Mexique. L'analyse soigneuse de ceux-ci était quasi impossible. Le chef de l'équipe médicale pestait :
— Je fais ce que je peux. Dans l'état où c'est...
Maintenant Barnett sentait l'odeur de la créature, qui avait totalement envahi sa combinaison.
— Bon sang, qu'on en finisse. Ce truc est une infection.
— Je sais, mais qu'est-ce que vous voulez que j'y fasse. On a des ordres. J'ai une autopsie à faire, je la fais. Et tant que je n'aurais pas fini ce job, vous resterez là, à filmer.
Ils étaient tous les trois assez tendus, mais Jack avait quand même la certitude d'assister là à un spectacle extraordinaire.
— Qu'est-ce que c'est que ces monstres de cirque?
L'un des médecins prit une pincette et se dirigea vers les yeux. Il dit à son collègue.
— L'un des autres a perdu une de ses lentilles, je vais les lui retirer.
Sa pince chercha un point d'encrage sur le coin extérieur de l'œil, et souleva une mince pellicule noire et souple, qu'il déposa dans un bocal de verre. Les yeux devinrent subitement plus humains. La pupille tournée vers le haut, ils présentaient un large blanc.
Puis la boite crânienne fut ouverte à la scie, la peau repliée sur le front et le cerveau extrait. Barnett fut très surpris par l'épaisseur du crâne : deux bons centimètres, peut-être trois par endroits. Il n'osa pas toucher, pour ne pas gêner les deux toubibs, mais cela ne ressemblait pas à de l'os. On aurait plutôt une sorte de cartilage.
Le travail des médecins était pénible. Sous leur lourde combinaison anti-radiations, ils étaient en nage et de la buée se déposait sur leur visière. Heureusement, leur travail devait s'interrompre toutes les trois minutes pour permettre au cinéaste de recharger sa caméra avec un film Kodak-Eastman. Quel dommage, pensa-t-il, de faire un tel film en noir et blanc. Pour un tel coup, la couleur aurait certainement été plus adéquate. Mais il aurait fallu filmer en extérieur. Le kodachrome n'aurait jamais été assez sensible pour donner quoi que ce soit sous cette lumière artificielle.
L'autopsie fut réalisée en trois heures et demie, qui lui semblèrent des siècles, à cause de mort, horriblement pénétrante. Jack s'efforça de ne pas y penser, en se concentrant sur son job. Il consomma cent vingt bobines, sur le lot de cent cinquante qu'il avait pris avec lui. Au fur et à mesure il notait les scènes filmées sur les étiquettes et balançait les cartouches dans une boite.
Lorsque la créature fut dépecée comme un cochon avant une noce, les médecins placèrent les bas-morceaux dans différentes glacières après les lui avoir fait filmer en gros plan.
— Ca ne donnera pas grand-chose, pensa-t-il?
La peau de la créature était lisse, comme celle d'un lézard sans écailles, et avait bien tenu le coup. Mais à l'intérieur, c'était différent. A un moment un des médecins, enlevant un gros organe qui occupait le bas-ventre, eut toutes les peines du monde à le transporter sans qu'il ne se déchire sous son propre poids. Le cerveau, exempt de circonvolutions, ne valait guère mieux. Il ne vit pas de cervelet. Seulement une masse de fibres à moitié décomposées, que le médecin jeta dans le bac émaillé, avec le cerveau.
L'extraction du cerveau terminait l'autopsie. Ils ne quittèrent pas la pièce tout de suite. Les deux médecins se reculèrent et observèrent une dernière fois le cadavre, avant de quitter la pièce. Ils avaient du sang jusqu'aux épaules.
— Quel chantier!
— J'ai déjà fait des autopsies, mais un boulot comme celui-là, jamais. Une vraie boucherie. Allez, filons.
Jack termina sa dernière bobine, pris la boite de films sous son bras et suivit les deux autres. Dans le sas, ils se déshabillèrent et enfournèrent leur combinaison dans de grandes cantines en ferraille.
Ils se précipitèrent dans les douches pour essayer d'échapper au plus vite à l'odeur de cadavre qui les imprégnait. L'un des médecins lâcha :
— C'est pas tous les jours qu'on dissèque un martien.
— Parce qu'il vient d'une autre planète?
— Ben c'est clair, mon vieux, et une gonzesse en plus! rigola l'autre médecin, cachant sa propre tension sous un humour mal placé.
— Comment savez-vous qu'il est du sexe féminin?
— Tu n'as pas regardé entre les jambes?
— Oui mais il n'y a pas de seins...
— Tu sais les martiennes ont les seins dans le dos, c'est plus pratique pour danser...
Les deux médecins retrouvaient leurs plaisanteries de carabins, seul remède connu pour faire passer la peur de la mort dans les salles de dissection des facultés de médecine. Mais l'un d'eux fut pris de malaise quelques minutes plus tard.
Au même moment, l'avion de Johnson, escorté par les services secrets atterrissait sur la piste.
Au Major Marcel qui l'accueillit, il dit
— Allons mon vieux, montrez-moi vos petits hommes verts.
— Jaunes mon Commandant, ils sont jaunes.