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Pierre R. Parent
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La Foire aux Mystères
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épisode premier
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Le Bouzouki de la Grande Confusion
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En fin d'après-midi
par une nuit tranquille, les cinq doigts de la main du manchot du
coin tenaient une circulaire sur laquelle on annonçait une grande
foire qui n'était point destinée pour foirer. Sa femme,
qui était une Égyptienne assoiffée de sang,
trouva que l'occasion était rêvé pour vivre une
palpitante aventure au volant d'un sac de pommes de terre bien attaché.
Les quatres filles du couple étaient de retour de l'école
lorsque la femme eu la ferme intention d'y aller comme à chaque
année pour vendre sa plus jeune fille au plus offrant.
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Non loin de là,
Piêtre-Paul dit le Pieux et Entre-Jean dit le Sauvage étaient
bien avertis que la foire aux vertus non-foireuses finirait bien par mal
finir; bref, foirer. Leur grand-père, qui était
aussi à la fois le géniteur et le beau-frère
de ces deux joyeux mutants, était un grand Shaman d'une tribu voisine
et pouvait voir dans l'avenir les choses dont personne ne se préoccuperait
une fois passées. Piêtre-Paul et Entre-Jean étaient
les plus proches voisins du manchot et se réjouissaient à
l'idée que la petite Oudoule débarrasse les lieux de
ses affreux pleurnichages à cause de rien.
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De l'autre côté
de la rue, vivait Joshua dit l'Imbécile. Il avait les cheveux
bleus, une longue moustache verte et toujours vêtu de haîllons,
il chantait tard le soir pour que quelques chats quelquonques lui
lancent quelques gâteaux moisis garnits de fruits confits.
Le lendemain, lorsque le Pieux et le Sauvage l'interpelèrent,
l'Imbécile, par accident, composa son refrain pour la chanson
qu'il chanterait ce soir pour les matous: "Et c'est ainsi que déboule
un débile, débagoulant dans l'escalier!" Et l'Imbécile
s'essuya la bouche après être sortit de son inspiration,
avant de prendre une expiration et répondre à sa calvinse
de porte. Le Pieux et frère dirent que la foire n'avait pas
encore foirée et l'invitèrent à y aller avec
eux. L'Imbécile accepta avec grand plaisir l'invitation
et leur remit la politesse en les emmenant dans sa propre voiture.
La route était calme cette journée là; pas de vagues,
pas de brume, et pas de troupeau d'éléphants blancs
qui traverse la rue à dix heures le matin.
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Au marché, des
marchands de fruits et des vendeurs de camelotte chialaient leur
stocks à l'épouvante. Les consommateurs achetaient,
les acheteurs consommaient et le manchot se cachait de Papyrus; l'homme-singe
du
Népal, vendeur de boules de quille autrichiennes. L'Imbécile,
le Sauvage et le Pieux avaient pris une pause pour déguster
quelques bons beignets bien gras sortants juste de l'huile; des beignets
d'encan au sucre en poudre. Le Pieux avala son beignet de travers
lorsqu'il apperçut de l'autre côté de l'allée
un bouzouki chez un marchand de choses usagées et inutiles.
Le Pieux laissa donc les deux autres pour se rendre sur les lieux
de la vente pour examiner le luthe athénien. Il n'y avait
que deux cordes.
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"Il n'y a que deux cordes à ce bouzouki! fit Piêtre-Paul.
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-Serais-tu interressé de faire l'acquisition de cet instrument défectueux?
demanda le vendeur.
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-Non, je ne faisais que demander. fit le Pieux.
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-La vie est parfois mystérieuse, mais toi, tu ne requierts point
d'en savoir le
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sens." fit sagement le vendeur.
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Le Pieux s'en retourna
donc rejoindre ses comparses. Le Sauvage vit ainsi
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l'instrument et prit la relève.
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"Ce sacré bouzouki n'a que deux cordes! fit Entre-Jean.
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-Et veux-tu vraiment avoir cet instrument de musique qui ne joue pas?
demanda le vendeur.
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-Euh... non... non, je voulais juste savoir.
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-Vas t'r'assir." déclara sagement le vendeur.
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Le Sauvage revint donc perplexe
et mélangé comme deux fois le premier.
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L'Imécile était partit se promener, profiter de la vie et
des dispositions de
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l'Égyptienne à moitié nue derière la tente
du marchand de tapis polonais.
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Joviale et soulagé, il vint à passer devant le vendeur au
luthe.
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"Ce bouzouki n'a que deux cordes! fit Joshua.
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-Pourquoi donc cela serait important, souhaiterais-tu l'acheter?
demanda le vendeur.
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-Oui, je voudrais décorer mon salon." répondit l'Imbécile.
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Le vendeur, sombrant dans le doute et prit au
dépourvu, pausa un court moment.
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Il sourit et dit à l'Imbécile: "Mon fils, la
vie est bien mystérieuse, bien
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des choses restent inexpliquées. Mais si c'est pûrement
décoratif, tu n'as pas
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besoin des cordes et ce sera douze dollars."
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