Compilation de différentes interventions sur un forum cinéma de www.caramail.com que je fréquente. Réaction à propos d'un classement des plus grands films de l'histoire par la revue Sight & Sound. Ma réaction et mes reflexions sur cette problematique dans la partie 2.
(Mel Vadeker, octobre 2002)


QU'EST QU'UN FILM CULTE ?
(partie 1)
 
Sujet : Films cultes
A: ici on parle ciné...
Date:10/08/02 04:47:46

Lu sur allociné :

La revue britannique Sight & Sound a demandé à des
critiques et cinéastes leur classement des plus grands
films de l'histoire. En tête : "Citizen Kane"

Le premier film d'Orson Welles semble décidemment
imbattable : l'oeuvre est citée depuis quarante ans comme
le plus grand film de l'histoire du cinéma par les enquêtes
réalisées tous les dix ans par le magazine anglais Sight &
Sound.

La revue a une nouvelle fois demandé à 250 personnes du
milieu du septième d'établir leurs préférences. Les
résultats sont ensuite répartis en deux votes, avec d'un
côté un groupe de critiques internationaux, et de l'autre,
des cinéastes tels que Quentin Tarantino, Bernardo
Bertolucci ou Michael Mann pour n'en citer que quelques
uns. Plus de 700 films ont ainsi été cités au moins une
fois.

Des résultats légèrement contrastés

Les réalisateurs et les critiques ont plébiscité des grands
classiques de l'histoire du cinéma plutôt que des oeuvres
modernes. Le film cité le plus récent est Raging Bull de
Martin Scorsese réalisé en 1980. Cinq oeuvres sont
présentes dans les deux Top 10, dont un film français : La
Regle du jeu de Jean Renoir. Pour le reste les deux votes
diffèrent quelque peu...

Top 10 des critiques :

1 - Citizen Kane (1941) d'Orson Welles
2 - Sueurs froides (Vertigo) (1958) d'Alfred Hitchcock
3 - La Regle du jeu (1939) de Jean Renoir
4 - Le Parrain (1972) / Le Parrain, 2e partie (1974) de
Francis Ford Coppola
5 - Le Voyage à Tokyo (1953) de Yasujiro Ozu
6 - 2001 : l'odyssée de l'espace (1968) de Stanley Kubrick
7 - L'Aurore (1927) de Friedrich-Wilhelm Murnau
8 - Le Cuirassé Potemkine (1925) de Sergei Mikhailovich
Eisenstein
9 - Huit et demi (1963) de Federico Fellini
10 - Chantons sous la pluie (1951) de Stanley Donen et Gene
Kelly

Top 10 des cinéastes :

1 - Citizen Kane (1941) d'Orson Welles
2 - Le Parrain (1972) / Le Parrain, 2e partie (1974) de
Francis Ford Coppola
3 - Huit et demi (1963) de Federico Fellini
4 - Lawrence d'Arabie (1962) de David Lean
5 - Docteur Folamour (1963) de Stanley Kubrick
6 - Le Voleur de bicyclette (1948) de Vittorio De Sica
7 - Raging Bull (1980) de Martin Scorsese
8 - Sueurs froides (1958) d'Alfred Hitchcock
9 - Rashomon (1950) d'Akira Kurosawa
10 - La Regle du jeu (1939) de Jean Renoir
- Les Sept samourais (1954) d'Akira Kurosawa


RÉACTIONS DIVERSES DE LA PART DE CINÉPHILES AVERTIS
Sur plusieurs mois, le thème de la définition du film culte est récurrente, cela revient périodiquement sur le forum.
De:  clockwork
Sujet: Qu'est-ce qu'un film culte ?
A: ici on parle ciné...
Date: 14/06/02 13:28:06

Je me pose la question depuis quelques jours :

« qu’est-ce qu’un film culte ? »

Un film culte est représentatif d’une population à
l’instant « t ». C’est à dire qu’il est fédérateur d’une
certaine idéologie, ou pensée permettant de s’y retrouver.
Un film culte est à mon sens « humain » car nous concernant.
C’est pourquoi, un film culte est avant tout personnel car
faisant appel à notre propre sensibilité. Chacun possède
donc ses propres films cultes.
D’après moi, il n’existe pas de film culte rassemblant tout
le monde (c’est à dire n’importe quel être humain) mais
plutôt des ensembles de gens.
Ainsi, « Le grand bleu » de Besson (pour prendre un exemple
facile) est considéré comme culte par un nombre conséquent
de gens qui l’on vu adolescent et s’y sont en quelque sorte
reconnu (dans le rôle de Mayol). Il en est de même pour
d’autres films comme « 2001 », « le Parrain », et j’en
passe.
C’est pourquoi je pense que certains films que l’ont
considèrent comme étant de vrais navets sont considérés par
certains comme étant cultes. Un exemple récent : « Fast and
furious ». Ce film est vide pour moi mais certainement
culte pour certains (notamment les fans de grosses
cylindrés).

Je voudrais savoir la définition que vous donnez à ce
terme : « film culte ».



De: Al
Sujet: Re: Qu'est-ce qu'un film culte ?
A: ici on parle ciné...
Date: 14/06/02 20:35:14

> Je voudrais savoir la définition que vous donnez à ce
> terme : « film culte ».
> --------------------------------------

Re :
comme le terme est vague, il est donc employé à différentes
sauces. Mais on peut distinguer 4 cas typiques :

1- gros succès public. Exemple : Rocky Horror Pictures
Show, Le Goût des autres, la Guerre des étoiles. Star Wars
est à ma connaissance le film le plus souvent qualifié
de "culte".

2- succès auprès de la critique et échec commercial.
Exemples: Citizen kane, Fight Club.

3- les films ciblant une sous-culture (sous-culture étant
employé ici dans un sens non péjoratif) Exemple : Point
Break, La Haine, Scream. A noter que dans ce cas, les films
sont souvent qualifiés de culte par des observateurs
extérieurs à la sous culture concernée, ce qui rend leur
jugement pour le moins sujet à caution.

4- des films à audience confidentielle dont l'attaché de
presse essaie de redorer le blason.

Par extension, des gens qualifient de culte le réalisateur
de leurs films culte. Burton Welles Fincher Kubrick ..



De: solomon
Sujet: L'idée de culte
A:  ici on parle ciné...
Date: 14/06/02 21:46:59

Bonnes analyses sur la définition du terme culte qui peut
se comprendre à un degré individuel (film préféré) et
collectif (phénomènes de groupe bien décrits par al). En
tout cas je rejoins Paul dans sa définition et je ne vois
rien à y ajouter.



De:  clockwork
Sujet: Re[1] Qu'est-ce qu'un film culte ?
A: ici on parle ciné...
Date: 15/06/02 12:57:29

> 3- les films ciblant une sous-culture (sous-culture étant
> employé ici dans un sens non péjoratif) Exemple : Point
> Break, La Haine, Scream. A noter que dans ce cas, les
films
> sont souvent qualifiés de culte par des observateurs
> extérieurs à la sous culture concernée, ce qui rend leur
> jugement pour le moins sujet à caution.

-----------------------------------------------------------
C'est justement cette troisième catégorie qui est la plus
intéressante car la plus personnel. Cela rejoint ce que je
dis sur la perception d'un film qui fera qu'il sera culte
ou non par n'importe qui.



De:  Alan
Sujet: Film Culte
A: ici on parle ciné...
Date: 17/06/02 14:48:13

Plusieurs définitions peuvent être apportées pour
comprendre ce que peut être un "film culte".
Beaucoup de réponses ont déjà été apportées mais je
voudrais juste rajouter que les films cultes sont des films
qui ont marqué une génération et ont laissé une "empreinte"
dans l'histoire du cinéma.
Ces empreintes peuvent être de formes diverses :
- Casablanca par exemple, film culte pour plusieurs
raisons : cela se passe pendant la Guerre Mondiale, couple
mythique d'Hollywood, hésitation de 6 mois de la part des
scénaristes pour savoir si Ingrid Bergman partirait avec
Paul Henreid ou Humphrey Bogart...
- La Grande Bouffe, uniquement pour son scandale au
festival de Cannes (comme le film de Pialat, "Sous le
soleil de Satan").
- Cléopâtre : budget colossal et échec commercial percutant
qui a failli couler la MGM...
- Ben-Hur : le film de Wyler qui a permis à la MGM de
survivre...
- La Fièvre du Samedi Soir, Grease...films
de "générations" : naissance du disco
- The Killer, par exemple, des films qui ont permis à des
réalisateurs étrangers de se faire connaître du monde
entier comme "Shichinin No Samuraï", "Naissance d'une
Nation"...
- des films qui ont apporté du neuf dans le cinéma, soit
par des techniques révolutionnaires (on peut penser aux
films de Melies) soit en créant un genre nouveau (comme la
trilogie de Ford pour les westerns, les comédies
américaines de Capra/Lubitsch, Nosferatu -> naissance du
film fantastique)...



De:   al
Sujet: Re[1] Films cultes
A: ici on parle ciné...
Date: 11/08/02 03:56:06

> -------Message d'origine-------
> De : HAL
> Date : 10/08/02 19:29:16
Je trouve assez ridicule d'élever un film au rang
de "meilleur de tout les temps". Surtout quand il s'agit
de la rengaine "Citizen Kane". En dépit de toute les
qualités cinématographiques de celui ci, n'est ce pas
quelque part absurde de le considérer comme meilleur film
parmi d'autres tous aussi bons?
Certes Citizen Kane est avant-gardiste par bien des égards,
je ne vais pas m'étendre sur ce point. Mais je ne peux
croire qu'il n'y a pas une grande part de subjectivité qui
gouverne le tout. (...)
> ---------------------------------------
> -------Message d'origine-------
> De : let
> Date : 11/08/02 00:02:55
citizen kane, je l ai vu. je l ai pas pas aime (…) je
comprends pas en quoi c est un si grand film.
> -------------------------------

Re :
1
c'était un film en avance sur son temps. Ce classement
replace les films dans leur époque.

2
Ce classement reflète une « réflexion » centrée
essentiellement sur le cinéma des années 50 et 60. Sur les
16 films cités dans ces deux TOP 10, plus de la moitié (9
films sur 16) ont été réalisés sur une période de 18 ans
(1950-1968).
Le cinéma existe depuis un siècle. L’idée que la majorité
des chef d’œuvres de l’histoire du cinéma ont été réalisés
sur une aussi courte période est évidemment absurde.
Ce classement montre simplement l’importance que la
majorité des critiques et des réalisateurs interrogés
accordent à cette période.
Cette importance est sans doute liée au fait que lorsque
ces professionnels du cinéma connaissaient leurs premiers
émerveillements en tant que spectateurs, les chefs
d’oeuvres des années 50-60 étaient suffisamment récents
pour séduire de jeunes spectateurs mais suffisamment
anciens pour qu’un consensus objectif – non soutenu par le
battage promotionnel accompagnant la sortie d’un film – se
dégage autour de leurs indéniables qualités.
Si ce classement est réalisé en 2020, il comportera sans
doute deux ou trois films réalisés entre 1982 et 2002,
alors qu’il n’en comporte actuellement aucun.
Les experts, tout comme Monsieur-Tout-le-Monde, sont
enfermés dans une culture liée à l’époque où ils vivent, et
leurs jugements sont tout aussi arbitraires.



De:  al
Sujet: Re[1] Films cultes
A: ici on parle ciné...
Date: 19/08/02 08:36:13

Juste deux ou trois remarques à propos de ce classement.

Tout tourne autour d'une grande question : est-ce qu'un
jugement artistique est purement subjectif, ou peut-il
s'affirmer objectif ? La réponse est bien sûr entre les
deux. Le tout est de savoir sur quels critères on se base.
Entre un critique qui met Ozu parmi les meilleurs cinéastes
mondiaux, et l'étudiant du coin qui trouve qu'Amélie
Poulain est génial, les deux ne parlent pas la même langue,
ni d'ailleurs de la même chose.

Si les films cités sont la plupart anciens, c'est dû je
pense à deux phénomènes. Un phénomène objectif : dans les
années 40-50, le cinéma a appris à gérer le parlant et est
entré dans sa phase de maturité. La proportion de mauvais
films et de bons films était sûrement la même que de nos
jours, mais les bons films étaient, en plus, fondateurs.
C'est le privilège des débuts, comme pour Eisenstein avec
le muet. On a pu faire plus subtil depuis, mais les grands
films cités sont ceux qui ont posés les bases à partir
desquelles le cinéma s'est ensuite développés.

L'aspect plus subjectif, c'est que cette période marque
aussi l'avénement de la grande critique de cinéma, avec
Bazin, Les Cahiers du Cinéma et autres. Et certains films,
comme Citizen Kane, ont tellement marqué la critique
qu'encore aujourd'hui elle continue de le considérer comme
un film révolutionnaire.

Jacques Lourcelles, dans son "Dictionnaire du cinéma"
(Bouquins) dit que ce film a plus marqué l'histoire de la
critique que celle du cinéma. Ca vaut aussi sûrement pour
beaucoup d'autres films.

Autrement dit, il faut avoir conscience qu'un critique
n'est jamais qu'un être humain avec ses défauts, mais aussi
qu'il ne fait pas ses choix à la légère. Au lieu de dire
que chacun peut penser ce qu'il veut et que "des goûts et
des couleurs on ne discute pas", il faut au contraire
discuter, confronter, et comprendre pourquoi certains
préfèrent certains films à d'autres.

Moi, par exemple, pour avoir consacré un an à travailler
sur le Fellini-Satyricon, de Fellini (1969) pour ma
maîtrise, je peux dire que je le considère comme un des
meilleurs films du monde.

Et celui qui met Truffaut au-dessus de tout aura aussi ses
raisons.

Mais je serais moins d'accord pour Tarantino : c'est selon
moi surtout un cinéma adolescent, tapageur mais peu
profond.

Mais de toute manière, l'idée de faire un classement est
stupide. Sa seule utilité est de faire réfléchir sur ce
qu'est un bon film, mais ça n'a surtout pas de valeur
absolue.
> --------------------------------------

Re :
Tout ce que tu dis est censé sauf un passage qui est
nettement dans l’erreur :

« dans les années 40-50, le cinéma a appris à gérer le
parlant et est entré dans sa phase de maturité. La
proportion de mauvais films et de bons films était sûrement
la même que de nos jours, mais les bons films étaient, en
plus, fondateurs. C'est le privilège des débuts, comme pour
Eisenstein avec le muet. On a pu faire plus subtil depuis,
mais les grands films cités sont ceux qui ont posés les
bases à partir desquelles le cinéma s'est ensuite
développés. »

Le cinéma a utilisé le parlant de façon variée. Mais sans
progression qualitative au fil des décennies. Nous avons
effectivement eu dans les années 40 et 50 des films
fortement dialogués et l’âge d’or de la comédie musicale.
Ce sont deux manières d’utiliser le son et de faire se
parler les personnages. Aujourd’hui, nous sommes revenus à
un cinéma presque muet et écrit selon des critères
complètement différents, avec derrière des bandes sons qui
font l’objet d’un travail considérable mais inconcevable il
y a 50 ans.

Vouloir distinguer dans le siècle 2 décennies où on aurait
PLUS « posé les bases » de ce qui a suivi que dans tout
autre décennie est voué à l’échec. Le concept de «
maturité » est une façon déguisée de parler d’âge d’or. Ce
qui ne peut être qu’une vue de l’esprit car il est
impossible de définir des critères de jugement objectifs
qui traversent ne serait ce qu’une moitié de siècle.

Le classement de Sight & Sound fait la part belle aux
années 50-60 (plus de la moitié des films) bien que les
films produits à cette période ne soient pas plus «
fondateurs » que ceux produits 20 ans plus tard ou plus
tôt. Star wars et Mad Max ont posé des codes narratifs
aussi fondateurs pour la fin du siècle que Citizen Kane ou
La règle du jeu pour les années d’après guerre.



De:   al
Sujet: Re[2] Films cultes
A: ici on parle ciné...
Date:  20/08/02 12:50:45

Alors celle-là elle est quand même assez énorme Al, tu ne
m'avais pas habitué à tant ! "Mad Max" est effectivement un
trés bon film, bourré d'idées et certainement novateur à
son époque (du point de vu du spectacle). "Star Wars" a
aussi apporté quelques idées en matière de trucage mais sa
réelle inovation dans l'histoire du cinéma ne s'est faite
que du point de vu économique (le marchandising prime
depuis sur le film), c'est tout ! Son apport en matière de
narration est nul, zéro, nada, rien. C'est visuellement
aussi plat qu'une série AB (et je pèse mes mots).

Je croix que ton gros problème est que tu sous-estimes
considérablement ces monuments que sont "Citizen Kane" et
"La Règle du Jeu". Tu n'évalues pas à quel
point leur apport dans le cinéma est énorme du point de vu
de la mise en scène et de la réalisation. Et je pense
surtout que toi (et tant d'autre) n'arrivez pas à
comprendre qu'aujourd'hui on a pas fait mieux en terme de
cinéma.

Je me fiche pas mal des années 50 ou 60. Moi je vois que
tout les films de ce fameux top ten méritent largement leur
place, parce que aprés les avoir vu, et revu pour la plus
part, leur modernité trés actuelle, et surtout leur éternité
artistique m'est apparu comme une évidence. Je suis
toujours incroyablement impressioné quand je vois un film
de Welles ("KANE" ou un autre) par le sens de la nouveauté
que je ne retrouve que trés peu aujourd'hui. Et constement
je me demande comment tant de cinéaste (et pas seulement de
notre époque) ont pu passer à coté de ça, comment
l'héritage de Welles a-t'il pu a ce point être si peu
transmit.
Et on peut remonter encore plus loins avec les héritages de
Chaplin ou de Murnau. La vrai question n'est pas pourquoi y-
a-t'il eu tant de chef-d'oeuvres à telle époque mais plutôt
pourquoi y en a-t'il eu si peu aprés ?
> ---------------------------------------

Re :

1
Lol Ton dernier paragraphe contient l'incohérence sur
laquelle j'essaie d'attirer ton attention. Ton approbation
sans réserve d'un tel classement signifie que tu considères
que plus de la moitié des chefs d'oeuvres de l'histoire du
cinéma ont effectivement été faits sur une courte période
18 ans, entre 1950 et 1968 ! :o))) Ce classement qui te
parait si fondé exclut par exemple Chaplin et Murnau dont
tu penses pourtant beaucoup de bien. Comment concilies tu
ces contradictions et as tu un idée sur ce qui suscite en
toi une opinion aussi élogieuse de cette période ?

2
"Stars wars" et "Citizen Kane" ont eu des influences de
durée et de profondeur comparables.
En ce qui concerne "Star Wars", tu regardes l'arbre qui
cache la forêt. Il ne s'agit pas de telle ou telle
technique d'effets spéciaux mais de la naissance du film
d'action SF moderne.
Pour la première fois quelqu'un comprenait que les
spectateurs, et notamment les jeunes spectateurs, ceux qui
représentaient l'avenir des salles de cinéma pour les 30
ans à venir, voulaient voir un film plein de
rebondissements comme un film de guerre ou de pirates mais
dans un cadre dépaysant de SF. De l'action, c'est bien,
mais de l'action avec des choses futuristes ou
surnaturelles, c'est encore mieux.

Un nouveau "mix" était né, comme disent les américains. Ce
mix, c'est le mix fondateur de Terminator, Matrix, Batman,
Spiderman, Armageddon, Men in Black, Starship Troopers,
Stargate et une bonne partie des films d'actions (du
blockbuster à la série Z) des 3 décennies suivantes. C'est
sur ce mix qu'on fait encore aujourd'hui la majeure partie
des films SF.
Ce standart d'écriture est né le 25 mai 1977.



De: solomon
Sujet: Films cultes
A: ici on parle ciné...
Date: 20/08/02 13:21:04

Je constate que la notion du culte déchaîne toujours autant
les passions et qu'il est encore fait bien peu de cas de la
sensibilité d'autrui au profit d'un débordement égoïste et
aveugle. N'est-il pas pourtant plus simple de reconnaître
qu'en tous temps et dans des genres différents, tel ou tel
film a innové et contribué à enrichir l'hétéroclisme du
paysage cinématographique ? Oui Chaplin et Murnau sont des
génies et revoir leurs oeuvres est une délectation. Bien
sûr que Welles a permis au spetième art d'acquérir ses
lettres de noblesse. Quant à Lucas, mettons de côté cet
aspect merchandising (il est plus facile de créer un jouet
adapté de Star Wars que de Citizen Kane...), et
reconnaissons franchement que dans le genre il est une
pierre fondatrice, unique et superbe. Cessons d'essayer de
comparer l'incomparable, rentrons dans nos poches nos goûts
propres et concentrons-nous sur le formidable impact que
tous ces films ont eu sur le cinéma. Je suis un fanatique
de l'oeuvre de Lucas mais je ne lui donne cependant pas
l'exclusivité du génie et de l'innovation. Heureusement que
la tempérance de Al est légendaire car autrement c'est le
genre de réaction qui entraîne des débats aussi vains que
pénible dont l'objet n'est ni la qualité, ni le côté
novateur du film, mais bien une thématique douteuse visant
à imposer ses goûts, forcément meilleurs que ceux des
autres.



De: al
Sujet: Re[3] Films cultes
A:  ici on parle ciné...
Date:  20/08/02 13:54:03

> -------Message d'origine-------
> De : Tetsuo
> Date : 20/08/02 13:11:23
Ce n'est pas la période qui m'interesse. Je me fiche pas
mal de savoir que les plus grands chef-d'oeuvres ont été
réalisés sur une période de cinquante, vingt ou même un an.
> -------------------------------

Re :
c'est évidemment. Et les personnes interrogées par Sight &
Sound pour réaliser ce classement sont dans le même cas,
car elles n'avaient pas une vue d'ensemble des films pour
lesquels les autres personnes votaient.

Cependant, le bon sens suggère qu'il y a eu des génies à
toutes les époques. L'universilité d'un classement
privilégiant une aussi courte péiode est donc sujette à
caution. Que ton adhésion sans réserve à ce top 10 suscite
de la curiosité n'est donc pas surprenant.

> ---------------------------------------
J'ai vu ces films et je comprend pourquoi ils sont les
meilleurs du monde, point.
> ---------------------------------------

Re :
Exactement. C'est ça qui je veux savoir : sur quoi s'appuie
cette certitude.

> --------------------------------------
> [Ce standart d'écriture est né le 25 mai 1977]
C'est là que quelque chose tic entre nous : nous ne parlons
manifestement pas de la même chose. Que "Star Wars" ait
révolutionner l'industrie des années 80/90 du cinéma en
permetant aux scénaristes d'aller plus loin je ne le nie
pas. Tant mieux, c'est déjà ça de gagner si on
a pu avoir des films sympas grâce à ça.
Mais il est incomparable à "Citizen Kane" dans le sens où
ce film n'a rien révolutionné mais est une révolution en
soi.

A part Kubrick et Godard qui s'est vraiment inspiré de
Welles ? Personne !

C'est pour cela que "kane" reste une oeuvre perpétuellement
en avance car de par ses schémas narratifs, sa réalisation,
sa mise en scéne elle exibe une modernité artistique,
thématique et visuelle qui la classe definitivement au
dessu du lot.

Ce qui m'interesse beaucoup plus que de savoir en quoi un
film à marquer son temps (chose anacdotique qui en aucun
cas n'est une critère de qualité) c'est en quoi un film est
intemporel, en quoi c'est une oeuvre génial qui se suffit à
elle-même sans avoir recours à tout ce qu'elle a inspiré
par la suite. L'oeuvre de Welles est génial parce qu'elle
inove constament le principe de cinéma à chacun de ses
plans, rebrousse à contrario tout les schémas narratifs
existant, interroge le spectateur sur le fonctionnement de
l'image, cumule d'idées visuelles inouïes, fonctionne sur
une mise en scêne maitrisée à la perfection et surtout
parce que son influence est ineccessible de par sa grandeur
(j'espère que tout ceci répond à ton post sur l'intention
de l'auteur, post qui m'a troublé, je l'avoue).

"Star Wars" n'a pas fait le quart du tier de tout cela.
Même s'il influence le cinéma pour les cent prochaines
années à venir (Dieu nous en garde !) il ne sera pas un bon
film pour autant.
> ----------------------------------------

Re :
comme tu ne donnes aucun exemple concret, je peux décrire
Star Wars dans les termes exacts où tu viens de parler de
Citizen Kane. Démonstration complète à la fin de ce message.
D'où la question, sur quoi t'appuies tu pour dire que
Citizen Kane est il plus novateur que Star Wars ? Peux tu
être plus précis ? Peut être as tu un exemple ? Comme tu
t'en doutes, il est facile de donner des centaines
d'exemples montrant à quel point le mix de Star Wars était
novateur.

________________________________________

PARAPHRASE DE TON TEXTE sur Citizen Kane
pour Star Wars
________________________________________

" Star Wars n'a rien révolutionné mais est une révolution
en soi.

De par ses schémas narratifs, sa réalisation, sa mise en
scéne ce film exibe une modernité artistique, thématique et
visuelle qui le classe definitivement au dessu du lot.

Ce qui m'interesse beaucoup plus que de savoir en quoi un
film à marquer son temps (chose anacdotique qui en aucun
cas n'est une critère de qualité) c'est en quoi un film est
intemporel, en quoi c'est une oeuvre génial qui se suffit à
elle-même sans avoir recours à tout ce qu'elle a inspiré
par la suite. Le film de Lucas est génial parce qu'il inove
constament le principe de cinéma à chacun de ses plans,
rebrousse à contrario tout les schémas narratifs existant,
interroge le spectateur sur le fonctionnement de l'image,
cumule d'idées visuelles inouïes, fonctionne sur une mise
en scêne maitrisée à la perfection. "



De:  al
Sujet: Re[4] Films cultes
A: ici on parle ciné...
Date:  23/08/02 13:19:33

> > -------Message d'origine-------
> De : Tetsuo
> Date : 21/08/02 14:36:49
Plus que les trucages ou les flash back le rEel apport
novateur de "Citizen Kane" se situe dans un principe de
rEalisation que Welles amait appeller "l'audience camera".
UtilisE tout le long du film ce principe consiste à amener
le spectateur à assister à toute les scènes qu'il dEsire
quitte à dElaisser le narrateur. Pour illustrE ce principe
la camEra n'hEsite donc pas à passE à travers les murs et
les portes, par dessus les toits ou de s'attarder sur de
tout petits dEtailles (puzzle, bouteille de mEdicament,
chalet miniature....). La grande intelligence de Welles est
d'ainsi nous faire croire que le spectateur maitrise la
situation et rEsoud l'enquète de son propre chef tout en le
manipulant à sa guise. C'est Egalement grace à se principe
que l'Enigme "Rosebud" que le journaliste charger de
l'affair laisse incomplète, apparait sous nos yeux Ebahis à
l'aide d'un long mouvement de grus qui à lui tout seul
rEsume le film (la camEra brasse toute les possessions de
Kane qui vont finir bruler, exprimant de cette manière la
richesse de son existence ainsi que sa futilitE).
Tout ceci pour dire quoi ?
Et bien tout simplement que le dEcoupage du film est
extrEmement prEcis et travaillE. Pas un plan n'a EtE fait
au hasard. Il y a par exemple une utilisation assez
constente de la profondeur de champ trEs symbolique. Dans
la scène ou la femme de Kane prend des cours de chant
donner par un maestro dEcouragE par son Elève (admirez la
qualitE de la mise enscène et comprenez une fois pour toute
de quoi je parle nom de dieu !!!) la construction du cadre
est trEs rigoureuse. C'est un plan sEquence fixe,
d'ensemble ou la profondeur de champs laisse appercevoir le
bout de l'immense salon. Le professeur est en bas à droite
assis à un piano, le femme à gauche debout en train
de "chanter". Le professeur ne cesse de la rabaisser.
Pendant qu'il emploit les pires insultes Kane apparait tout
au bout du cadre, au fond de la pièce. La courte focale
nous permet de distinguer trEs nettement la silouhette et
de le reconnaitre mais nEammois il nous est impossible de
voir clairement ses traits et son expression facial si bien
que sa prEsence se fait plus resentir que de nous sauter au
yeux. Il apparait au fond du cadre pile entre les deux
autres protagonistes laissant au professeur, qui ne la pas
remarquer tout de suite (l'audience camEra !!!) le loisir
de continuer à insulter sa femme. Un malaise se crEE. Kane
s'approche en poussant un crie , faisant ainsi taire le
professeur et devient une menace certaine. L'emploie de la
profondeur de champ exprime parfaitement cette volontE de
faire transpara”tre à l'ecran l'EtrangetE d'une situation.
En s'approchant Kane arrive forcEment à l'avant plan avec
les autres personnages. On le voit sourir, la menace s'est
envolE. Chaque sEquence du film est composE de cette
manière, semEes de petites trouvailles. Comme la scène où
les parents du petit Kane dEcident de son avenir tandis
qu'on le voit jouer dans la neige à travers la fenêtre se
qui crEE un cadre dans le cadre, un effet de split screen
qui montre l'insoucience de l'enfance pendant que le destin
opère. Il y a aussi la cElèbre scène de l'opEra ou Welles
ne cadre que les visages des protagonistes concernEs
(trois) pendant le rEcital et capte ainsi leurs Emotions
(la souffrance, l'accablement et le dedeignement) au point
le plus fort. La formidable scène ou en une floppE de mini-
sEquences (de trois à cinq secondes) Welles montre la
dEgradation de dix ans de mariage d'un couple, sans que le
cadre et le dEcor ne change. Et plein d'autre encore, le
film est tellement riche d'idEe et d'ingEnuositE qu'il
serait impssible de toutes les ressencEes. Je passe sur le
travaille de la lumière qui s'adapte à toutes les Emotions
du film, du cadrage en contre plongE qui ampliphie
l'assiduitE de la mise en scène et surtout le travail sur
la direction d'acteur qui est certainement le plus
incroyable qu'on ait vu au cinEma depuis qu'il existe (peut-
être avec Chaplin) tant leurs dEplacement, leurs atitudes
sont d'une justesse qui pousse l'Emotion trEs loin (voyez
le film un peu ! Je vais pas tout dEmontrer non plus !)
"Citizen Kane" est certe un film sur la perte de
l'innocence, la folie destructrice du pouvoir, la
mEgalomanie, la solitude... Mais c'est surtout un film qui
se veut une dEmonstration formelle du vaste Etendu des
possibilitEs narratives du cinEma, de sa richesse visuelle
et thEmatique. Le film brasse tout les genres possibles
(comEdie, policier, drame, horreur, fantastique,
documentaire...) et tente d'annoncer que le cinEma peut
aller loin trEs loin dans l'expression artistique. TrEs peu
de gens aurons entendu se message...
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Re :
Ton récapitulatif de la thématique du film (« perte de
l'innocence, la folie destructrice du pouvoir, la
mEgalomanie, la solitude ») est indulgent et tu t’emballes
un peu avec cette affirmation exagérée sur « sur la
direction d'acteur qui est certainement le plus incroyable
qu'on ait vu au cinEma depuis qu'il existe ».

Mais ton énumération des qualités formelles du film
(Mouvements de caméra modernes, caméra subjective,
découpage précis et travaillé, utilisation de la profondeur
de champs, utilisation des gros plans, éclairages soignés)
est assez fidèle au film et personne ici ne songera à la
contester.
Donc, d’un côté, nous avons « Citizen kane » et ses
qualités formelles, de l’autre « Star Wars » et son mix
novateur.
Et tu en conclues que « Citizen Kane » est un film
prodigieux méritant pleinement de figurer dans le
classement Sight & Sound tandis que « Star Wars » est un
film certes sympathique mais qui n’a absolument pas sa
place dans ce TOP 10.

Comment établis tu cette hiérarchie ? Une trouvaille
scénaristique vaut elle moins qu’un mouvement de caméra
ingénieux ? La forme a t elle à tes yeux plus de valeur que
le fond ? Est ce sens du dérisoire et de la futilité des
choses qui te fait ressentir avec « Citizen Kane » un
parfum de chef d’œuvre absent des péripaties spatiales d’un
gamin et d’une princesse ? Pour toi, un film comme «
Citizen Kane » qui s’adresse à un public adulte est il
forcément plus créatif qu’un space-opera destiné à des
ados ? Ou alors est ce le fait que « Star Wars » a été un
succès qui le rend à tes yeux inférieur à « Citizen
Kane » ? Un film incompris par le public de son temps est
souvent auréolé d’un prestige subtil que ne peut avoir un
succès.
Bref, comment tu parviens à une comparaison si défavorable
à « Star Wars » ?

Pour la fin de ton message, tu as tort, comme te le fait
remarquer Kenny, de vouloir ramener «une modernité
artistique, thématique et visuelle » à des exploits de
chefs op (exploits qui sont effectivement absents de Star
Wars). La force (lol) de Star Wars réside son mix
scénaristique novateur.

Merci encore une fois répondu si précisement sur "Citizen
Kane". J'espère que tu pourras éclairer ma lanterne sur ta
manière de comparer les deux films.

PS
Dernier détail : tu écris « le film-révolution en matière
de Space-opera c'est quand même 2001 »
a) Bien que 2001 se passe dans l’espace et qu’on y entende
de la musique classique, le chef d’œuvre de Kubrick n’est
pas un space opera. (détails disponibles sur demande) mais
en remplaçant « space opera » par SF, je saisis ce que tu
veux dire. D’où b)
b) l’existence d’un chef d’œuvre n’empêche pas un autre
réalisateur de réaliser un film révolutionnaire relevant du
même genre cinématographique dans une période ultérieure.